24 septembre 2017 – 762

 

DIMANCHE.

Vie littéraire. Pierre Michon ne sera pas à Guéret pour les Rencontres de Chaminadour. Il sera en Suisse pour une autre manifestation littéraire. Guéret, il en a soupé, et on imagine ce qu’il peut penser de ceux qui s’y rendent par plaisir. Par compensation, nous allons le voir au cinéma dans le rôle de l’écrivain Jacques Tournier, ami de Barbara. On a déjà raté Bergounioux chez Godard, on ne va pas rater Michon chez Amalric.

MARDI.

Épinal – Châtel-Nomexy (et retour). James Ellroy, Le Dahlia noir, Rivages/Noir, 1998.

Vie littéraire. Arrivée du n° 19 de la revue Les Refusés qui contient une visite de chantier Invent’Hair autour de l’enseigne “L’Hair du temps” et de ses variantes.

Lecture. La Fin de l’homme rouge ou Le Temps du désenchantement (Vremia second hand (konets krasnovo tcheloveka), Svetlana Alexievitch, Vremia, Moscou, 2013 pour l’édition originale, Actes Sud, 2013 pour la traduction française, traduit du russe par Sophie Benech, rééd. Babel n° 1415, 2016; 688 p., 12 €).

Svetlana Alexievitch donne la parole aux habitants de l’ex-URSS. Entre 1991 et 2012, elle a recueilli, à l’aide d’un magnétophone, des témoignages de toutes provenances. Ce sont des femmes et des hommes, des civils et des soldats, des nostalgiques de Staline et des tenants du capitalisme, des Russes et des Abkhazes, des jeunes et des vieux, d’anciens gardiens et d’anciens prisonniers qui se succèdent à son micro pour raconter leur vie et leur pays. L’auteure n’intervient pas, à peine quelques mots de présentation ici ou là, aucun jugement, aucune opinion. Ce qu’elle veut, c’est “saisir le moment […] où la vie toute simple se transforme en littérature.” Et c’est bien ce rapport entre l’histoire (personnelle et générale) et la littérature qui se pose avec ce livre qui oscille constamment d’un de ces pôles à l’autre. Le lecteur, parfois amusé, souvent effaré par cette peinture de l’homo sovieticus, mange aux deux râteliers, s’instruisant sur le passé récent d’un pays et goûtant des récits souvent prenants et richement mis en mots.

MERCREDI.

Éphéméride. “À un Alfred P…, collectionneur de mes autographes :

… Pourquoi dites-vous que certaines de mes lettres sont “compromettantes” ? Est-ce parce que j’y parle de ma misère ? Si votre “admiration” vous avait incité à me lire seulement un peu, vous sauriez que j’ai proclamé moi-même, dans la plupart de mes livres, cette misère généreuse qui fut un effet de mon libre choix, ayant eu souvent le moyen et l’occasion de m’en délivrer, et dont je suis fier comme je pourrais l’être de donner mon corps à brûler pour Jésus-Christ…” (Léon Bloy, L’Invendable, 13 septembre 1906)

JEUDI.

Épinal – Châtel-Nomexy (et retour). Anthony Marra, Une constellation de phénomènes vitaux, JC Lattès, 2014.

VENDREDI.

Épinal – Châtel-Nomexy (et retour). Maxime Chattam, La Conjuration primitive, Pocket, 2014.

Lecture. Gravesend (William Boyle, 2013 pour l’édition originale, Payot & Rivages, coll. Rivages/Noir n° 1000, 2016, pour la traduction française, traduit de l’américain par Simon Baril; 352 p., 8,50 €).

On sait le soin avec lequel Gallimard choisissait les auteurs des numéros historiques de la Série Noire : Jim Thompson pour le numéro 1000, Thierry Jonquet pour le numéro 2000, un Américain, un Français, deux auteurs majeurs, deux chefs-d’œuvre. Pour une telle échéance, Rivages a choisi de miser sur un inconnu, William Boyle, qui pourrait bien ne pas le rester longtemps. Son roman est une peinture d’un quartier de Brooklyn, où il réside, nourri des films de Scorsese et de De Niro ancrés dans la communauté italienne de New York. C’est un roman noir dans lequel échoue tout ce qui est entrepris par les personnages : la vengeance de l’un, la rédemption de l’autre, le braquage entrepris par un troisième, sans oublier les échecs sentimentaux et professionnels de chacun. En agissant ainsi, William Boyle démolit la base du polar traditionnel : les bons comme les méchants sont défaits, anéantis.

Capharnaüm n° 5 (Finitude, été 2015; 96 p., 13,50 €)

“Drôles d’idées”

Capharnaüm est une revue à parution irrégulière sans ligne éditoriale affirmée : on s’y intéresse à des choses littéraires un peu décalées, les éditions du Scorpion dans un numéro précédent, Michel Ohl dans sa dernière livraison. Sous le titre “Drôles d’idées…”, elle rassemble des textes inconnus d’auteurs plus ou moins renommés, Louisa May Alcott, Jerome K. Jerome, Frigyes Karinthy, Thomas B. Thorpe. Ce sont des nouvelles qui complèteront les connaissances de ceux qui suivent de près ces écrivains, sans forcément donner envie d’en savoir plus pour les autres.

Le cabinet de curiosités du notulographe.

déménagements clocher, paris, rue réaumur, gilles bertin, 762

Paris (Seine), rue Réaumur, photo de Gilles Bertin, 1er mars 2017

SAMEDI.

Films vus pendant la semaine. Barbara (Mathieu Amalric, France, 2017)

Juillet août (Diastème, France, 2016)

La Faille (Fracture, Gregory Hoblit, É.-U. – Allemagne, 2007)

Ils sont partout (Yvan Attal, France – Belgique, 2016)

L’Eau à la bouche (Jacques Doniol-Valcroze, France, 1960)

Le Correspondant (Jean-Michel Ben Soussan, France – Belgique, 2016)

Dieu seul le sait (Heaven Knows, Mr. Allison, John Huston, É.-U. – R.-U., 1957).

L’Invent’Hair perd ses poils.

  l'aquafure, montréal, 762  l'aqua'fure, montcenis, 762

Montréal (Québec, Canada), photo de Benoît Melançon, 4 janvier 2011 / Montcenis (Saône-et-Loire), photo de Marc-Gabriel Malfant, 20 mars 2014

Poil et plume.

marko, vivre avec..., 762

Marko, Vivre avec…

              Vie littéraire. Nous sommes à Guéret pour les 12e Rencontres de Chaminadour. Nous retrouvons le Théâtre de la Fabrique, attendons dans le hall que la table ronde en cours se termine pour prendre place dans la salle. Nous assistons au débat sur “La littérature et le démon du négatif” (?) avec Oliver Rohe, Maylis de Kerangal et Vincent Message. Je ne comprends pas grand-chose aux propos échangés, il faut dire que je ne suis pas très attentif, empli que je suis de la béatitude née du simple fait d’être de retour en Creuse. Tellement béat que je finis par m’endormir. Au réveil, je vais renouveler mon ordonnance à la pharmacie de la place du Marché, m’attable au Moderne où je lis La Montagne et fais un peu de courrier. La ville est vide, comme d’habitude, cela donne une idée de ce que sera Épinal dans quelques années, au moins nous ne serons pas surpris. La boîte à livres de la place Bonnyaud a disparu, je comptais la garnir avec un plein carton suite au rangement annuel de mes étagères, tant pis, je m’en débarrasserai ailleurs.

DIMANCHE.

Vie littéraire (suite). L’hôtel où nous créchons est complet, et ce n’est pas grâce à Chaminadour. Des gens âgés, des têtes chenues qui se déplacent, ont les moyens de voyager. Si on arrive à remplir un hôtel à Guéret en plein septembre, on imagine à quoi doivent ressembler Venise et Barcelone, ça donne envie. Retour place Bonnyaud pour le bœuf gras. Je donne à Arno Bertina le bonjour dont m’a chargé un notulien et le remercie pour ses contributions à l’Invent’Hair. On sort la bête, on l’enguirlande, on déploie les banderoles, on fait les photos traditionnelles mais la pluie battante empêche les musiciens de jouer et le défilé est annulé. Il est temps de rentrer at home, et je me trouve moins triste que l’an passé dans la même situation, ayant au cœur le secret espoir de revenir ici dans le temps des fêtes.

MERCREDI.

  Éphéméride.

Vence, 20 septembre [19]61

Mon cher Gaston,

Je voudrais bien t’aider à faire construire un atelier. Je te prie de consulter un entrepreneur du pays et lui donner les mesures de ce qu’il te faut et le prier d’établir un devis aussi rapidement que possible et quand tu auras ce devis tu me l’enverras aussitôt. Peut-être qu’il serait possible de construire en deux épisodes, c’est-à-dire commencer par un petit local pas trop coûteux en arrangeant la construction de manière à ce qu’il soit facile de construire, un ou deux ans plus tard, un second local qui forme agrandissement. Mais il est important que le local ne soit pas humide et par conséquent il faut qu’il y ait un vide sanitaire  sous le plancher et même ce serait mieux si ce n’était pas au rez-de-chaussée. Ne manque pas d’attirer l’attention de l’entrepreneur sur l’importance d’avoir un local bien sec et bien sain. Je suis heureux qu’on te dispense de l’opération de l’appendicite. Moi j’ai aussi l’intestin mal foutu. Affectueusement à toi

Jean Dubuffet (Gaston Chaissac, Jean Dubuffet, Correspondance 1946-1964)

VENDREDI.

Le cabinet de curiosités du notulographe. Présence du notulographe dans le cinématographe.

didion, une belle fin 1, 762    didion, une belle fin 2, 762

Une belle fin (Still Life, Uberto Pasolini, R.-U. – Italie, 2013)

SAMEDI.

Films vus pendant la semaine. La Nouvelle Vie de Paul Sneijder (Thomas Vincent, Canada – France, 2016)

Entre les murs (Laurent Cantet, France, 2008)

Blood Father (Jean-François Richet, France, 2016)

Tu honoreras ta mère et ta mère (Brigitte Roüan, France – Grèce, 2012)

L’Origine de la violence (Élie Chouraqui, France – Allemagne, 2016)

If…. (Lindsay Anderson, R.-U., 1968).

L’Invent’Hair perd ses poils.

kitafékoi, paris, rue de ménilmontant, 762

Paris (Seine), rue de Ménilmontant, photo de Pierre Cohen-Hadria, 14 janvier 2011

Poil et plume. “Et si je liais tes pieds et tes mains avec un cheveu de ma tête, résisterais-tu ?

Il répondit, comme il avait déjà répondu :

– À toi, je ne résisterai jamais.

Elle hésita, puis :

– Si, tes pieds et tes mains une fois liés par ce cheveu, tes ennemis entraient ?…

Il la regarda et, cette fois, s’écarta un peu d’elle :

– T’ai-je dit qu’à toi, non plus qu’à rien qui me viendra de toi, je ne résisterai ? Ton cheveu, je ne le briserai donc point. Jamais, quoiqu’il arrive !

Elle le connaissait. Elle savait que jamais mensonge n’avait pu passer par sa bouche.

Alors, elle se leva, très vite. De sa tête, elle arracha un cheveu, très vite. Et, très vite, de ce cheveu, elle lia les deux mains du kaïd-amrar. Après quoi, d’un autre cheveu, elle lui lia les deux pieds.

Puis, debout, et frappant dans ses mains, elle appela.

Dans l’instant, les hommes soudoyés par elle entrèrent, et se précipitèrent sur le captif. Lui la regarda, elle. Mais il ne brisa ni l’un des cheveux, ni l’autre.” (Claude Farrère, Les Deux Cheveux)

Bon dimanche,

Philippe DIDION

 

 

 

 

 

10 septembre 2017 – 761

N.B. Le prochain numéro des notules sera servi le dimanche 24 septembre 2017.

DIMANCHE.

Vie estivale (fin). J’effectue ma promenade kantienne à Saint-Jean-du-Marché en me disant que ce pourrait bien être la dernière de la saison.

MERCREDI.

Éphéméride.6 septembre [1950]     Traversant la Nouvelle-Angleterre en train, je commence à comprendre qu’Alexis voit juste quand il critique les Américains pour leur obsession incessante de voir et d’acquérir de nouvelles choses. Il se sentait bien à Wellfleet et voulait prolonger son séjour pour en tirer tout le profit possible. Il faudrait trouver une formule qui lui permette d’être avec nous, sans que nous nous sentions envahis.” (Katherine Biddle, Journal 1940-1970)

VENDREDI.

Le cabinet de curiosités du notulographe. Les dessous de la magie à Nancy (Meurthe-et-Moselle), photo de l’auteur, 9 janvier 2016.

761-5

SAMEDI.

Football. SA Spinalien – Yzeure 1 – 1.

Films vus pendant la semaine. Bécassine (Pierre Caron, France, 1940)

  Diamant noir (Arthur Harari, France – Belgique, 2016)

  La Taverne de la Jamaïque (Jamaica Inn, Alfred Hitchcock, R.-U., 1939)

  Moka (Frédéric Mermoud, Suisse – France, 2016)

  Pour l’exemple (King & Country, Joseph Losey, R.-U., 1964)

Le Fils de Jean (Philippe Lioret, France – Canada, 2016)

Minuit à Paris (Midnight in Paris, Woody Allen, Espagne – É.-U. – France, 2011).

              Invent’Hair, bilan d’étape. Bilan établi au stade de 3600 salons, atteint le 22 avril 2017.

Bilan géographique.                                                                                     

Classement général par pays.

1. France : 3037 (+ 82)
2. Espagne : 159 (+ 4)
3. Royaume-Uni : 54 (+ 1)
4. États-Unis : 45 (=)
5. Belgique : 41 (+ 1)
6. Italie : 36 (+ 12)
7. Danemark : 21 (=)
8. Suisse : 20 (=)
“. Portugal : 20 (=)
10. Pérou : 19 (=)
“. Canada 19 (=)

Pas de changement en tête mais l’Italie se rapproche du top 5.

Classement général par régions (France).

  1. Rhône-Alpes : 593 (+ 18)
  2. Île-de-France : 477 (+ 5)
  3. Languedoc-Roussillon : 264 (+ 11)
  4. Lorraine : 234 (+ 4)
  5. Provence-Alpes-Côte-d’Azur : 213 (=)
  6. Midi-Pyrénées : 172 (+ 1)
  7. Bretagne : 121 (+ 13)
  8. Bourgogne : 120 (+ 5)
  9. Pays de la Loire : 113 (+ 8)
  10. Centre : 108 (+ 3)

La Bretagne passe devant la Bourgogne.

Classement général par départements (France).

1. Seine (Paris) : 386 (+ 4)
2. Rhône : 317 (+ 15)
3. Vosges : 141 (+ 2)
4. Pyrénées-Orientales : 87 (+ 8)
“. Loire-Atlantique : 87 (+ 5)
“. Loire : 87 (+ 2)
7. Meurthe-et-Moselle : 72 (=)
8. Alpes-Maritimes (=) : 70
“. Saône-et-Loire : 70 (+ 2)
10. Hérault : 67 (+ 1)

La 4e place est bien encombrée. Derrière le Rhône, le département le plus photographié de cette centaine est le Morbihan (+ 13) qui passe de la 49e à la 26e place du classement.

Classement général par communes.

1. Paris : 386 (+ 4)
2. Lyon : 142 (+ 6)
3. Barcelone : 54 (=)
4. Nantes : 53 (=)
5. Nancy : 42 (=)
6. Épinal 36 (=)
7. Nice : 33 (=)
8. Marseille 24 (=)
“. Villeurbanne 24 (=)
10. Perpignan : 18 (+ 1)

Bruxelles disparaît du top 10. Lorient fait une entrée remarquable à la 22e place avec 11 salons. Belle progression pour Naples (42e, + 7), qui gagne 239 places. Cassino, Langres, Pontchâteau font leur apparition en compagnie d’une vingtaine d’autres communes, portant le total de celles-ci à 1366.

Bilan humain.

  1. Marc-Gabriel Malfant : 1277 (+ 57)
  2. Philippe Didion : 324 (+ 1)
  3. Pierre Cohen-Hadria : 230 (+ 2)
  4. François Golfier : 179 (=)
  5. Jean-Damien Poncet : 150 (+ 7)
  6. Jean-Christophe Soum-Fontez : 141 (+ 3)
  7. Hervé Bertin : 123 (+ 15)
  8. Sylvie Mura : 82 (=)
  9. Benoît Howson : 65 (=)
  10. Bernard Cattin : 63 (=)

Rien de neuf en tête. JF Fournié, avec 10 photos, atteint un total de 40 et la 15e place (+ 2).

Étude de cas. Grillages et rideaux de fer.

  761  761-2

? (Martinique), photo de François Golfier, 18 juin 2013 / Courthézon (Vaucluse), photo de Martine Bédrune, 12 août 2015

  761-4  761-3

Aigues-Vives (Gard), photo de Marc-Gabriel Malfant, 22 mars 2016 / Guadix (Espagne), photo d’Hervé Bertin, 8 mai 2016

   L’Invent’Hair perd ses poils.

761-6  761-7

Nantes (Loire-Inférieure), photo de Bernard Bretonnière, 4 janvier 2011 / Fontaines-sur-Saône (Rhône), photo de Marc-Gabriel Malfant, 12 février 2012

Poil et plume. “Laissant Hyacinthe à ses voltages – et convenant qu’on se retrouve tout à l’heure –, Tausk va donc se faire couper les cheveux. Au salon, ce sera la même officiante que l’autre jour, piercée, tatouée, rugueuse et musculeuse, regard froid, pas un sourire ni rien, Tausk prendra le parti de se taire en attendant que ça passe. Mais après un robuste shampoing, une fois qu’il se retrouve sur le fauteuil, neutralisé sous une serviette, étranglé par le cordon du peignoir, aveuglé par un spot policier : Il me semble que je vous connais, déclare la coiffeuse, le scrutant d’un œil lourd tout en se frottant les mains. En effet, répond Tausk sur ses gardes, je suis venu le mois dernier.” (Jean Echenoz, Envoyée spéciale)

Bon dimanche,

Philippe DIDION

 

3 septembre 2017 – 760

DIMANCHE.

Vie estivale. On n’est que le 20 août mais ça sent la fin de saison à Gérardmer : soleil rare, sensation de fraîcheur, peu de monde. Je n’ai même pas la tentation de tâter l’eau, me contentant de ligoter au bord. Un parfum de rentrée pas agréable pour un sou.

Obituaire. “Je me souviens que le premier film de Jerry Lewis et Dean Martin que j’ai vu s’appelait La Polka des marins.” (Georges Perec, Je me souviens)

MARDI.

Vie littéraire. Je boucle mon article sur les Pléiade de Perec. J’aurai pris mon temps, il faut dire qu’il y avait de la matière même si je n’ai pas tout relu. Je me demande cependant comment travaillent les recenseurs des quotidiens qui ont pondu leur critique dès la sortie des deux volumes, quand ce n’est pas avant celle-ci. Ils ont sans doute reçu les services de presse avant moi mais n’ont pas disposé de six semaines de vacances pour étaler leur boulot comme j’aime à le faire. J’aurais du mal à me passer du confort qu’il y a à travailler pour une revue trimestrielle.

           TV. Pierre Bergounioux : La passion d’écrire (France 3). Bergou parle pendant une heure et c’est comme pour la lecture des Carnets de notes: on voudrait que ça ne s’arrête jamais.

MERCREDI.

Éphéméride.

Ma. 23.8.1988

Nous touchons à l’heure fatale que je voyais littéralement, le 15 juillet 1986, ou le 16, en regagnant Les Bordes, avec Marie, tandis que Ninou et Cathy partaient pour Grenoble où Norbert était hospitalisé. Je m’efforçais, malgré moi, de percer le mur du temps, de deviner ce qu’il nous dérobait. Et ce que j’ai vu, avant que d’autres anticipations, moins terribles, ne le disputent à la première, c’est un cercueil de chêne que l’on portait en terre.” (Pierre Bergounioux, Carnet de notes 1980-1990)

Lecture. Temps Noir n° 17 (Joseph K., 2014; 352 p., 18 €).

« La Revue des Littératures Policières »

VENDREDI.

Le cabinet de curiosités du notulographe. Critique kantienne à Beauvais (Oise), photo de Bernard Cattin, 2010.

              Vie parisienne. Alice m’accompagne pour cette dernière escapade avant la rentrée. L’orage nous accueille à la descente du dur et c’est une foule trempée qui patiente à l’entrée de Beaubourg en espérant trouver des serviettes au bord des piscines de David Hockney. La rétrospective est éblouissante, un véritable cours d’histoire de l’art donné par le parcours de cet Anglais touche-à-tout, de Fra Angelico aux expérimentations informatiques.

SAMEDI.

Vie parisienne (suite). La caissière n’a pas terminé son ménage, les surveillants ne sont pas encore à leur poste : nous faisons l’ouverture du Musée de Montmartre, et cette arrivée précoce nous permet de visiter les lieux sans voir âme qui vive. Ce qui a son importance dans la partie réservée à l’exposition temporaire qui nous attire ici – les collections permanentes, histoire des moulins et des cabarets de la Butte, ne sont pas renversantes. L’exposition, donc, présente Montmartre vu par le cinéma : affiches, objets, scénarios, photos et surtout quantité d’extraits de films de toutes époques et nationalités dont nous ne manquons pas une miette. On découvre par exemple Jean-Pierre Léaud, tout frais sorti des Quatre Cents Coups, dans une scène de Boulevard de Julien Duvivier (1960). J’achète à la sortie le DVD de Minuit à Paris que j’ai hâte de revoir.

Films vus pendant la semaine. 100 % cachemire (Valérie Lemercier, France, 2013)

Sa majesté des mouches (Lord of the Flies, Peter Brook, R.-U., 1963)

Fitzcarraldo (Werner Herzog, R.F.A. – Pérou, 1982)

Avant toi (Me Before You, Thea Sharrock, R.-U. – É-U., 2016).

L’Invent’Hair perd ses poils. Pour des cheveux en pétard.

Cherbourg (Manche), photo de Sibylline, 30 décembre 2010 / Lucens (Suisse), photo de Jean Prod’hom, 11 décembre 2010

Poil et presse.

Vosges Matin, 3 mars 2016

DIMANCHE.

Lecture. Tendre est la nuit (Tender Is the Night. A Romance, F. Scott Fitzgerald, Scribner, New York, 1934 pour l’édition originale, in “Romans, nouvelles et récits” II, Gallimard, 2012, Bibliothèque de la Pléiade n° 582, traduit de l’américain par Philippe Jaworski; 1780 p., 70 €).

Il faut toute la science et l’habileté de Philippe Jaworski dans sa présentation pour nous convaincre de l’excellence de ce roman. Après Gatsby, dont la densité fait le charme, on se trouve en effet face à une histoire étirée, souvent répétitive, avec une ronde de personnages fréquentant les mêmes lieux les uns après les autres. Il reste bien sûr le thème central de la désillusion, cher à l’auteur, qui trouve ici à le nourrir avec sa propre situation : le couple formé par les protagonistes, épisodes psychiatriques compris, rappelle en effet douloureusement celui de Scott et Zelda.

MARDI.

Lecture. Une chaumière et un meurtre (Fred Kassak, Presses de la Cité, coll. Un mystère n° 570, 1961, rééd. in “Romans humoristiques”, Le Masque, coll. Intégrales, 2003; 800 p., s.p.m.).

Dans sa postface, Fred Kassak avoue que cette Chaumière est, parmi ses romans, celui qu’il préfère. On n’est pas loin de partager son avis tant la légèreté, la virtuosité et l’humour qu’il y a mis font mouche. On y trouve aussi des clins d’œil à Queneau (Zazie vient de sortir) et des coups de griffe en direction du cinéma et de la Nouvelle Vague – peut-être n’avait-il pas aimé l’adaptation d’un de ses livrées précédents, On n’enterre pas le dimanche, par Michel Drach. Une chaumière et un meurtre sera lui aussi porté à l’écran par le beaucoup plus chenu Pierre Chenal, en 1963, sous le titre L’Assassin connaît la musique…

MERCREDI.

Éphéméride. “Dimanche 30 août [1942]

Mon beau dimanche. Cela me fait penser à Un beau dimanche anglais de Kipling.

J’aspirais à cette journée à Aubergenville, depuis quinze jours.

Il y avait Jean Pineau, Job et Lancelot of the Lake. Le miracle s’est reproduit. Pourquoi cesserait-il ? Dans le verger lumineux, là-haut, après le déjeuner sur le plateau dans le vent, et le retour dans le train.

***

Mais en rentrant, il y a eu lutte entre les souvenirs enchantés dont j’étais envahie, et la tristesse de la lettre de Papa, de nouveau complètement démoralisé.” (Hélène Berr, Journal)

                  Lecture. Histoires littéraires n° 64 (Du Lérot éditeur, octobre-novembre-décembre 2015; 152 p., 25 €).

Dossier Charles Baudelaire I.

Après un numéro hommage dont nous aurons à reparler, la revue se remettait doucement de la mort de Jean-Jacques Lefrère, son fondateur. Le numéro est mince, les livres chroniqués peu nombreux mais l’ossature est toujours là avec un dossier, un entretien (Marc Angenot) et la chronique des ventes et des catalogues qui devait perdre un peu plus tard un de ses collaborateurs, Jean-Louis Debauve. Le notulographe est responsable de la critique du n° 12 des Cahiers Georges Perec.

JEUDI.

Vie radiophonique. De l’inconvénient qu’il y a à ne pas être notulien. Question rouge posée au Jeu des mille francs, ce jour, sur France Inter : “Certaines personnes ont un nom prédestiné pour le métier qu’elles exercent. Comment appelle-t-on cette particularité ?” Les candidats sont restés cois.  Offrons-leur en guise de consolation ce bel aptonyme, puisque c’est de cela qu’il s’agit, exerçant dans la chirurgie viscérale :

C.H.U. de Nancy Brabois, Vandœuvre-lès-Nancy (Meurthe-et-Moselle), photo de Bernard Visse, date oubliée

VENDREDI.

Vie professionnelle. Retour au boulot. Il faut renouer avec quelques pratiques, retrouver quelques habitudes, accepter le fait que le 8 heures 08 ait quarante minutes de retard et prendre l’auto. Une fois sur place, j’apprends que les emplois du temps qui constituent le seul l’intérêt de cette journée de prérentrée ont été envoyés par Internet, sur je ne sais quelle messagerie inconnue de mes services. Je suis donc seul à ne pas le connaître, je me demande pourquoi les autres sont venus. Nous écoutons le laïus de notre nouvelle principale, qui semble parfaitement coulée dans le moule administratif. Je prends connaissance de mes listes d’élèves, une opération qui, par un temps, ne se déroulait pas sans appréhension : est-ce qu’on va échapper à tel ou telle, terreur de l’an passé ? Aujourd’hui, je m’en fous, c’est le simple fait d’être là qui me noue, malaise qui concerne mon être entier et qui ne disparaîtra que quand la machine sera lancée. Seule bouée à laquelle se raccrocher : dans quinze jours je serai à Guéret.

Lecture. Lettres (Saint-John Perse, Gallimard, 1972, “Œuvres complètes”, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade n° 240, 1972; 1428 p., 56 €).

Le cabinet de curiosités du notulographe. Le numéro 552 des notules présentait cette plaque, apposée sur la façade du 1 rue des Boulangers à Paris (Seine). La photo, de l’auteur, datait du 24 août 2012.

Le 20 août 2015, la plaque était remplacée (on voit les traces de colle) par une autre, toujours photographiée par l’auteur.

Le coeur était trop grand, il n’a pas tenu.

SAMEDI.

Films vus pendant la semaine. La Forêt pétrifiée (The Petrified Forest, Archie Mayo, É-U., 1936)

Éternité (Tran Anh Hung, France – Belgique, 2016)

Premier mai (Luis Saslavsky, France – Italie, 1958)

Code Momentum (Momentum, Stephen S. Campanelli, Afrique du Sud – É-U., 2015)

Jules et Jim (François Truffaut, France, 1962)

Bastille Day (James Watkins, R.-U. – France – É-U. – Luxembourg, 2016).

L’Invent’Hair perd ses poils.

Plouézec (Côtes-du-Nord), photo de Xavier Guézou, 26 décembre 2010 / Villers-lès-Nancy (Meurthe-et-Moselle), photo de François Golfier, 3 novembre 2011

   Poil et pellicule.

Le Dictateur (The Great Dictator, Charles Chaplin, É-U., 1940)

Bon dimanche,

Philippe DIDION