DIMANCHE.
Courriel. Une demande d’abonnement aux notules.
Lecture. Cible mouvante (The Moving Target, Ross Macdonald, 1949 pour l’édition originale, Gallmeister, 2012 pour la traduction française, rééd. coll. Totem n° 18, 2018, traduit de l’américain par Jacques Mailhos; 256 p., 8,80 €).
La première aventure de Lew Archer, un privé au nom choisi en hommage à Marlowe, a connu plusieurs éditions et traductions en français, changeant même de titre pour passer d’Il est passé par ici à Cible mouvante. Si le livre a un intérêt historique par la présentation d’un personnage vite devenu archétypal (privé désabusé, intègre et solitaire), l’histoire à laquelle Macdonald lui fait prendre part est beaucoup trop complexe pour être compréhensible. On se raccroche aux passages dans lesquels l’auteur montre d’autres talents que ceux requis pour la construction d’une intrigue policière, notamment les descriptions de la côte californienne réalisées au moyen de petites touches pleines d’images et de poésie inattendues.
MERCREDI.
Éphéméride. “23 janvier [1918]
Chez vous, c’est encore de la neige ? Ici, c’est une température de printemps. J’ai enlevé mon tricot, et, à midi, en sortant d’une tournée chez les fantassins, j’étais en sueur. Il est vrai que je marchais vite et que j’avais semé le poilu qui m’accompagnait. Je suis rentré à midi avec une faim de loup. J’étais parti avec un quart de jus dans le coco, et en route, j’avais mangé une pomme ramassée sous un pommier.” (Albert Viard, Lettres à Léa)
VENDREDI.
Le cabinet de curiosités du notulographe. Boîtes à lettres.
Toul (Meurthe-et-Moselle), photo de Françoise Plain, 6 juin 2007 / Liège (Belgique), photo de Jean-François Fournié, 28 mai 2018
SAMEDI.
Films vus. Les Nouvelles Aventures de Cendrillon (Lionel Steketee, France, 2017)
Tourments (El, Luis Buñuel, Mexique, 1953)
Si tu voyais son cœur (Joan Chemla, France, 2017)
Un grand patron (Yves Ciampi, France, 1951)
Marvin ou La Belle Éducation (Anne Fontaine, 2017)
Roman de gare (Claude Lelouch, France, 2007).
L’Invent’Hair perd ses poils.
Paris (Seine), rue Thérèse, photo de Pierre Cohen-Hadria, 8 avril 2011 / Monterey (Californie, États-Unis), photo de Noémie Fiore, 9 août 2014
Poil et presse.
Mémoires de Vidocq in Le Crapouillot, septembre 1934
Vie parisienne. J’assiste à l’Assemblée générale de l’Association Georges Perec à la Bibliothèque de l’Arsenal. Après le vote sur les rapports habituels, la discussion porte principalement sur le bulletin de l’association, dont j’ai la charge. Le passage au format numérique est devenu inéluctable devant l’accroissement des coûts de fabrication et d’envoi qui engloutissent désormais la moitié de la somme recueillie par les cotisations des adhérents. Reste la question du contenu qui m’amène à précise ma position : si l’on s’en tient à ce qui est fait jusqu’ici, je peux continuer à réaliser la chose, mais si l’on s’achemine vers un bulletin qui soit davantage dans l’air du temps avec liens, images et autres éléments interactifs, je n’aurai ni le temps, ni la compétence, ni l’envie de m’y atteler. Finalement, le statu quo l’emporte : “Il faut que tout change pour que rien ne change”. Du coup, je file m’acheter Le Guépard chez Compagnie.
DIMANCHE.
Vie parisienne. Cela fait plus d’un an que je ne suis pas allé au Louvre et que La Mémoire louvrière est en arrêt. Rappelons que ce chantier consiste à visiter le Louvre salle par salle, une seule à la fois, d’examiner chaque tableau et de laisser une trace écrite de cet examen. On a profité de mon absence pour effectuer un certain nombre de changements qui prouvent, comme je n’avais pas tardé à le remarquer précédemment, qu’un musée, image de la conservation intangible, est la chose la plus mobile qui soit : la numérotation des salles n’est plus la même, le contenu non plus, les plans muraux (“Vous êtes ici”) ont disparu et j’en arrive à me perdre dans des couloirs que j’ai parcourus des dizaines de fois avant de retrouver l’endroit où je m’étais arrêté lors de ma dernière visite.
Lecture. Ma vie d’homme (My Life As a Man, Philip Roth, Holt, Rinehart & Winston, New York, 1974, Gallimard, 1976 pour la traduction française, traduit de l’américain par Georges Magnane, rééd. in “Romans et nouvelles 1959-1977”, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade n° 625, 2017, traduction revue par Aurélie Guillain; 1208 p., 64 €).
Une partie de l’œuvre de Philip Roth est un jeu de miroirs dont Ma vie d’homme est le premier volet. Roth y donne la parole à son alter ego Peter Tarnopol qui fait précéder le récit de sa vie par deux nouvelles mettant en scène son double, Nathan Zuckerman. On peut lire cet ensemble en cherchant faire tomber les masques, d’autant qu’il est en grande partie inspiré par le premier mariage désastreux de Philip Roth et par les difficultés qu’il a connues pour y mettre fin. On peut aussi, et je m’en contenterai, lire ces textes comme des tranches de vie, comme on regarde les films du Woody Allen de la période new-yorkaise. Car si, à l’instar de Houellebecq, Roth utilise le sexe et la dépression comme principaux carburants alimentant ses fictions, il y ajoute un humour décapant, un sens de l’autodérision qui leur donnent une saveur incomparable.
LUNDI.
Courriel. Une demande d’abonnement aux notules.
Obituaire. “Je me souviens que Michel Legrand fit ses débuts sous le nom de “Big Mike”. (Georges Perec, Je me souviens)
MERCREDI.
Éphéméride. “Un professeur m’a dit : “Cette question des quêtes faites en classe n’est pas simple. J’ai pris soin cette année de dire aux élèves qu’ils étaient absolument libres; que je voulais ignorer le détail de leurs dons; que je m’engageais, quel que fût le total, à n’exprimer aucune opinion. Résultat : ils n’ont rien donné du tout, et je n’ai rien eu à dire. Eh bien voilà une expérience intéressante sans doute, mais dont les pauvres paient les frais. Aussi il m’est venu des scrupules au sujet de mes scrupules; peut-être la charité prise comme fin justifie-t-elle quelques moyens. Et si l’on peut, en exploitant l’orgueil, la bassesse ou la vanité des hommes, tirer d’eux un peu plus d’argent qu’ils n’en donneraient sans cela, c’est toujours autant de pris. […]” (Alain, Propos d’un Normand, 30 janvier 1907)
Lecture. Maldonne (Boileau-Narcejac, Denoël, coll. Crime-Club n° 205, 1962 pour la première édition, rééd. in « Quarante ans de suspense » vol. 2, Robert Laffont, coll. Bouquins, édition établie par Francis Lacassin, 1988; 1314 p., 120 F).
L’ambiance bourgeoise des polars de Boileau-Narcejac garde un certain charme et l’art qu’ils possèdent dans la construction de leurs intrigues rend celles-ci souvent très intéressantes. Souvent mais pas toujours car ici les thèmes éculés qui sont utilisés (sosie, amnésie) et la trop grande part accordée à la dimension psychologique des personnages, à travers la transcription de deux journaux intimes, ne jouent pas en leur faveur. Il y a bien maldonne, c’est le mot. Sergio Gobbi a tiré un film de ce roman en 1969 (pas vu).
VENDREDI.
Lecture. Pascal Pia ou le droit au néant (Roger Grenier, Gallimard, coll. L’un et l’autre, 1989; 140 p., 70 F).
Éditeur, critique, journaliste, chercheur, érudit, voilà les mots qui viennent à l’esprit quand on évoque Pascal Pia. Érudit surtout. Le bonhomme était une encyclopédie vivante de la littérature, savait par cœur des milliers de vers, connaissait tous les détails de la vie de l’écrivaillon le plus obscur et n’hésitait pas à partager son savoir avec tous ceux qui l’interrogeaient sur tel ou tel point de détail. Mais sur l’homme, on ne sait rien ou presque. Des pans entiers de sa correspondance (avec Camus, avec Caradec) ont paru mais révèlent peu d’intimité. Le témoignage de Roger Grenier, qui a longtemps été proche de Pia, notamment à Combat, est donc bienvenu. Il ne dévoile pas entièrement l’homme, qui savait garder ses secrets même avec ses amis, mais explique en partie sa discrétion, son caractère dépressif dû en grande partie à une expérience de la misère, la vraie, qui l’avait marqué pour toujours. Parmi la foule de gens que Pia a côtoyés, on n’est pas surpris de trouver André Frédérique, qui partageait le même mal de vivre et qui a fini par céder, lui, à la tentation du suicide.
Le cabinet de curiosités du notulographe. Mort de la boucherie artisanale en milieu creusois.
Bétête, 26 juillet 2017 / Chénérailles, 4 août 2017, photos de l’auteur
SAMEDI.
Films vus. Carré 35 (Éric Caravaca, France – Allemagne, 2017)
D’où viens tu… Johnny ? (Noël Howard, France, 1963)
Le Redoutable (Michel Hazanavicius, France – Birmanie, 2017)
Charlot boxeur (The Champion, Charles Chaplin, É.-U., 1915)
Charlot vagabond (The Tramp, Charles Chaplin, É.-U., 1915)
Mam’zelle Charlot (A Woman, Charles Chaplin, É.-U., 1915)
Charlot au music-hall (A Night in the Show, Charles Chaplin, É.-U., 1915)
Inferno (Ron Howard, É.-U. – Hongrie, 2016)
L’Affaire Macomber (The Macomber Affair, É.-U., 1947)
La Maison du lac (On Golden Pond, Mark Rydell, R.-U. – É.-U., 1981).
Football. SA Spinalien – Fleury 91 FC 1 – 1.
L’Invent’Hair perd ses poils.
Paris (Seine), rue Olivier-Métra, photo de Pierre Cohen-Hadria, 30 mars 2011 / rue de Clignancourt, photo de Jean-Christophe Soum-Fontez, 29 octobre 2015
Poil et pellicule.
Le Premier Homme (Gianni Amelio, France – Italie – Algérie, 2011)
Bon dimanche,
Philippe DIDION
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