LUNDI.
Bestiolaire de Saint-Jean-du-Marché. Identification d’une Fourmi rousse.
MARDI.
Lecture. Une peur noire (The Black Path of Fear, William Irish, 1944 pour l’édition originale, Presses de la Cité, coll. Un mystère n° 291, 1956 pour la première traduction française, rééd. Presses de la Cité, coll. Omnibus, vol. « Nuit noire », 1994, d’après la traduction de Paula Delen; 948 p., 135 F).
MERCREDI.
Lecture. Hôtel du Brésil (Pierre Bergounioux, Gallimard, coll. Connaissance de l’inconscient, 2019; 80 p., 9 €)
Éphéméride. “Mercredi 17 [juillet 1912]
Mauvaise nuit; sans doute à cause de la chaleur et du manque d’exercice. Je n’ose pas ouvrir les volets avant qu’il fasse jour par peur de laisser entrer quelque affreuse “bête rampante”. Je les ai pourtant ouverts à l’aube (vers 3 h 1/2 je crois). Mais je me suis levé à 7 h 1/2 [Un mot caviardé]. Il faut que je prenne de l’exercice et que je m’interdise les bains trop longs. Travaillé toute la journée : avant le petit-déjeuner; reçu ensuite les épreuves du Matador; les ai corrigées (entre 8 h et 10 h), envoyées à Jacques Rivière avec une lettre lui demandant s’il était possible d’en avoir trois exemplaires différents : un pour Arnold Bennett, le second pour Cipa Godebski; le troisième pour moi. envoyé cela sous enveloppe cachetée.” (Valery Larbaud, Journal)
JEUDI.
Brèves de trottoir.

VENDREDI.
Le cabinet de curiosités du notulographe. Ex-voto.

Plainfaing (Vosges), 28 mars 2016 / Plombières-les-Bains (Vosges), 5 mai 2016, photos de l’auteur
SAMEDI.
Films vus pendant la semaine. Le Daim (Quentin Dupieux, France, 2019)
Coup de foudre (Diane Kurys, France, 1983)
Plaire, aimer et courir vite (Christophe Honoré, France, 2018)
Robinson Crusoé (Zhizn udivitelnye priklyucheniya Robinzona Kruzo, Stanislav Govorukhin, U.R.S.S., 1973)
Le Musée des merveilles (Wonderstruck, Todd Haynes, É.-U., 2017).
Vie en Creuse. Nous étions de sortie hier soir, un anniversaire à fêter, rien de bien méchant mais la moindre entorse se paie désormais et j’ai passé une fort mauvaise nuit. Du coup, l’état comateux dans lequel je me trouve me prive de l’euphorie épuisante qui s’empare de moi lors de l’habituel transfert des Vosges à la Creuse. Le résultat est donc identique : même si c’est pour une raison différente, je suis totalement vidé au moment de lancer mon premier coup de canne dans l’étang en priant pour qu’aucune grosse pièce n’ait l’idée malencontreuse de se sentir attirée par mon leurre, je n’aurais pas la force de me battre pour la tirer de l’eau.
L’Invent’Hair perd ses poils.

Gaillac (Tarn), photo de Clotilde Eav, 24 avril 2011 / Pézenas (Hérault), photo de Marc-Gabriel Malfant, 8 mai 2011
Poil et pellicule.

Philadelphia (Jonathan Demme, É.-U., 1993)
DIMANCHE.
Bestiolaire de la Creuse. Identification d’un Onycogomphe à pinces, d’un Tétrix forestier, d’un Hanneton de juin, d’un Soufré, d’un Argus bleu et d’un Demi-deuil.
LUNDI.
IPC (Itinéraire Patriotique Creusois). Vite, une escapade avant que la chaleur nous cloue au gîte. Direction La Forêt-du-Temple où le monument aux morts affiche le nom d’un Poilu un peu particulier que je m’empresse de photographier avant de me mettre à l’ombre.

Bestiolaire de la Creuse. Identification d’un Caloptéyx vierge.
MARDI.
Bestiolaire de la Creuse. Identification d’un Criquet mélodieux et d’une Mouche-scorpion.
MERCREDI.
Éphéméride. “Lundi 24 juillet [1933]
Tantôt, pneumatique de M.D. me disant qu’elle est libre ce soir, alors qu’elle n’est pas sûre de l’être jeudi, et que je peux venir. Au surplus, conseil à me demander.
J’y suis allé. Le conseil était mon avis sur une lettre qu’elle adresse au journal Beaux-Arts à propos de tous les défauts et insuffisances de l’exposition Renoir. C’est fort bien écrit et elle paraît s’y connaître. Appris ce soir, du reste, dans la conversation, qu’elle sort de l’École du Louvre.” (Paul Léautaud, Journal particulier 1933)
JEUDI.
Brèves de trottoir.
*
* Papillon surréaliste.
Bestiolaire de la Creuse (et environs). Identification d’un Xylocope violet. Celui-ci, avec deux acolytes, butine les fleurs d’un jardin public situé en contrebas du Musée des musiques populaires de Montluçon (Allier). C’est la deuxième fois que nous le visitons, bonne pioche car l’endroit est climatisé et permet une variante dans les stratagèmes destinés à éviter la chaleur de four qui règne. Les deux jours précédents, c’est dans l’eau, à Châtelus-Malvaleix, que nous avions dû mettre nos couennes à rafraîchir.
Lecture. Retour à Brideshead (Brideshead Revisited, Evelyn Waugh, 1947 pour l’édition originale, Robert Laffont, 1950 pour la traduction française, traduit de l’anglais par Georges Belmont, rééd. coll. Pavillons Poche, 2017; 624 p, 12 €).
C’est un beau roman, c’est une belle histoire, un peu longue peut-être, en tout cas une découverte. Ça commence par un récit de college, des souvenirs d’Oxford racontés par un jeune aristocrate qui semble sorti d’un roman de Wodehouse. Mais au fur et à mesure que le narrateur prend de l’âge, la gravité s’installe et là ce n’est plus Wodehouse qui vient à l’esprit mais d’abord Fitzgerald pour l’évocation de la jeunesse gâchée, puis Proust pour la réflexion sur le temps, l’amour et la mémoire. Dans cette histoire, le lieu prime sur les personnages : Brideshead, propriété familiale d’un ami du narrateur, pivot d’une saga qui voit les personnages évoluer dans divers endroits du monde avant de retourner immanquablement au lieu des origines. Là-dessus se greffe une intrigue religieuse où il est question de mariage mixte, de conversion, de foi. Evelyn Waugh, écrivain catholique, se sentait apparemment très concerné par les rapports entre catholiques et protestants dans son pays. Cette partie théologique alourdit quelque peu un roman par ailleurs très fluide. On devine un anglais très pur, une belle langue dans la traduction de Georges Belmont, lequel n’est pas un inconnu : c’est lui qui a recueilli les souvenirs de Céleste Albaret pour en faire Monsieur Proust et il est l’auteur d’un intéressant livre de mémoires, Souvenirs d’outre-monde.
VENDREDI.
Le cabinet de curiosités du notulographe. Façades ouvertes, à la mode de La Vie mode d’emploi.

Holly Carden, Edgar Allan Poe’s Macabre Mansion, transmis par Lucie Didion, 3 décembre 2018 / Toyen, Loi naturelle, 1946, exposition Centre Pompidou Metz (Moselle), photo de Lucie Didion, 24 juin 2018
SAMEDI.
Bestiaire de la Creuse. Rencontre inopinée avec un chevreuil sur la route d’Ajain, rendez-vous à prendre chez le carrossier. La bête, elle, semble peu touchée et se carapate dans le sous-bois pour ne pas avoir à remplir le constat.
L’Invent’Hair perd ses poils.

Paulhan (Hérault), photo de Marc-Gabriel Malfant, 8 mai 2011 / Saint-Florent-sur-Cher (Cher), photo du même, 21 mars 2014
Poil et pellicule.
à comparer à
24 jours (Alexandre Arcady, France, 2014) / Paris (Seine), rue Philippe-de-Girard, photo de l’auteur, 29 juillet 2012
LUNDI.
Lecture. Rimbaud Warriors (Richard Gaitet, Paulsen, coll. Démarches, 2019; 240 p., 19,90 €).
Il existe une catégorie moins pénible que celle des écrivains voyageurs, c’est celle des lecteurs arpenteurs, ceux qui cheminent sur les traces plus ou moins visibles d’un livre, d’un personnage ou d’un écrivain. Je dis cela sans doute parce que n’étant ni écrivain, ni voyageur, je me plais à me ranger dans ce groupe, ayant usé pas mal de semelles et de pneus à sillonner villes et campagnes à la recherche de vestiges littéraires, accomplissant ici en Creuse, par exemple, tout le trajet des Vies minuscules de Michon ou marchant récemment sur les pas de Jean Genet dans son Morvan d’adoption forcée. Aussi l’initiative de Richard Gaitet m’avait intéressé dès que j’en avais eu vent et je l’avais signalée dans un article de revue : refaire, à pied, dans les conditions vécues donc, le trajet de la fugue effectuée par Rimbaud de Charleville à Charleroi en octobre 1870. Le projet aboutit à une série d’émissions diffusées sur Radio Nova et à ce livre qui en est le compte rendu. Pas seulement : on y trouve aussi le récit, en parallèle, du voyage de Rimbaud – nourri aux biographies de Jeancolas et de Lefrère –, des rencontres (Franz Bartelt, Brigitte Fontaine, Patti Smith), des considérations sur l’art de la fugue, des divagations, des poèmes… Tout cela sur un ton vif, plaisant, ce qui donne un excellent livre propre à séduire au-delà de la sphère des rimbaldolâtres.
Bestiolaire de la Creuse. Identification d’un Forficule et d’un Hanneton commun, observation d’un Géotrupe des bois occupé à transporter une galette de crottin de cheval.
MARDI.
Vie épistolaire. La session annuelle d’écriture estivale touche à sa fin, toutes les cartes postales sont écrites et envoyées ou peu s’en faut. L’exercice est beaucoup moins long qu’il y a quelques années, il reste peu de correspondants prêts à s’adonner à cette pratique désuète. Il s’agit donc de soigner ces happy few. Considérant qu’il pourrait devenir pénible pour eux de recevoir toujours les mêmes vues de la même Creuse, j’ai pris soin cette année d’emporter des cartes issues de ma collection personnelle. J’ai choisi bien sûr celles où figurent les lieux les plus éloignés de notre villégiature, San Francisco, Londres, Bangkok, le Lac Majeur (sous la neige), ce genre de choses. Je ne fais en cela qu’imiter la pratique de Lucie qui compense notre misérable tropisme creusois en achetant et en arborant fièrement des tee-shirts vantant les délices ensoleillées de l’Île Maurice, de Vientiane, de Saint-Domingue et d’ailleurs.
Vie sociale. Notre retraite creusoise devient, pour notre plus grand plaisir, un lieu de passage. La semaine dernière, Ch. & G. évoquaient ici les derniers instants de C. avant de rentrer à Savenay affronter le gouffre de son absence, aujourd’hui L. & T. viennent alléger en partie la dette d’hospitalité, élyséenne, que nous avons à leur endroit.
Bestiolaire de la Creuse. Identification d’un Oedipode turquoise et d’une Ammophile pubescente.
MERCREDI.
Éphéméride. “31 juillet [1932]
Tandis que, le dos tourné, je plie mes couvertures, je reçois une énorme fessée. C’est le petit de l’esclave – qui s’est glissé subrepticement dans ma chambre et s’enfuit maintenant en riant aux éclats – qui me l’a donnée. La captivité n’a pas l’air de l’avoir embarrassé beaucoup dans le genre espièglerie. Peut-être aussi tient-il à profiter d’ores et déjà de sa qualité d’homme libre.” (Michel Leiris, L’Afrique fantôme)
Bestiolaire de la Creuse. Identification d’une Sauterelle verte et d’un Petit nacré.
JEUDI.
Brèves de trottoir.
* 
* Paul Verlaine
VENDREDI.
Le cabinet de curiosités du notulographe. Faits divers animaliers.

Vosges Matin, 7 mai 2012, collection de l’auteur / Le Journal de la Haute-Marne, 21 février 2017, transmis par Jean-François Fournié
Vie en Creuse. Je le savais déjà mais la preuve est flagrante asteure : la simple perspective de quitter la Creuse me rendre malade, et je ne suis pas le seul. Aujourd’hui, 75% de la Didionnée est hors d’usage, fiévreuse, nauséeuse, détraquée jusque dans ses entrailles. Seule Caroline est debout et tient, comme d’habitude, la maisonnée à bout de bras. Même l’auto ne veut pas rentrer : la rencontre avec le chevreuil n’a pas occasionné que des dégâts externes, le “module d’air” est en compote, le refroidissement du moteur ne se fait plus. À Guéret, le mécano de chez Citron tente et réussit (jusqu’à plus ample informé) une réparation de fortune qui devrait nous permettre de regagner le nid. Et si l’on était obligés de rester ?
SAMEDI.
Films vus. Woodstock (Michael Wadleigh, É.-U., 1970)
Rolling Thunder Revue : A Bob Dylan Story by Martin Scorsese (Martin Scorsese, É.-U., 2019)
Je suis un aventurier (The Far Country, Anthony Mann, É.-U., 1954).
L’Invent’Hair perd ses poils.

Montagnac (Hérault), photo de Marc-Gabriel Malfant, 8 mai 2011
Poil et pellicule.

Le Monde, la Chair et le Diable (The World, the Flesh and the Devil, Ranald MacDougall, É.-U., 1959)
Bon dimanche,
Philippe DIDION
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