DIMANCHE.
Lecture.
Le Serpent majuscule (Pierre Lemaitre, Albin Michel, 2021; 336 p., 20,90 €).
Pierre Lemaitre a ressorti de ses tiroirs un manuscrit qui date de 1985. Sa carrière ne commencera que vingt ans plus tard avec une série de polars durs, très noirs, et l’on peut comprendre son choix de ne pas avoir proposé ce texte à ses éditeurs de l’époque. En effet, Le Serpent majuscule n’est pas du tout dans la même ligne, il contient peut-être plus de cadavres que tous ses autres romans mais c’est un polar fantaisiste à la manière de Fred Kassak, presque parodique, construit autour d’une mémé tueuse à gages qui commence à s’emmêler dans les contrats qu’on lui donne du fait d’une mémoire défaillante. On imagine très bien la chose adaptée à l’écran par Georges Lautner et Michel Audiard aurait adoré donner son rôle principal à Annie Girardot. On regrette, à sa lecture, le fait que Pierre Lemaitre ait tourné le dos au polar pour les grandes fresques historiques qui ont fait son succès. Il y a trouvé son compte, sa famille aussi désormais bien nourrie, mais cette réédition choisie montre qu’il partage un peu, lui aussi, ces regrets.
MARDI.
Vie de retraité (entraînement à la).
Dans la salle d’attente où j’attends, c’est fait pour, que mon père sorte de son rendez-vous médical, je trouve une pile de Notre temps, “le magazine de la retraite heureuse”. Je remplis sans trop de difficultés quelques grilles de mots croisés. Apparemment, je suis apte.
MERCREDI.
Lecture.
La Chamade (Françoise Sagan, Julliard, 1965, rééd. in “Œuvres”, Robert Laffont, coll. Bouquins, 2019; 1494 p., 30 €).
Françoise Sagan, en bonne lectrice de Proust, analyse de façon clinique une liaison amoureuse qui prend naissance dans un salon, version moderne et affadie de celui des Verdurin. La phrase n’est pas proustienne, ce n’est pas ce qu’on lui demande, mais la description des phases de cet amour est aussi précise et intéressante que chez son modèle. Modèle avoué d’ailleurs, Proust étant mentionné à deux reprises dans ce roman tout à fait réussi.
Éphéméride.
À Ernest Delahaye
“Lieu de Po[u]rrière[s], 20 avril 1912.
Cher ami,
C’est un signalement que vous nous demandez là, ce n’est pas une signature. Qu’est-ce à dire ?
Sentiments dévoués,
B. Nouveau
Professeur de dessin
Pourrières (Var)
Soigner les majuscules, S.V.P.” (Germain Nouveau, Correspondance)
JEUDI.
Lecture.
Histoires littéraires n° 81 (Du Lérot éditeur, janvier-février-mars 2020; 208 p., 25 €).
Charles Nodier – Robert Doisneau – Claude Farrère – Pierre-Victor Stock – Matthieu Letourneux.
VENDREDI.
Lecture.
Le Cercle des Pataphysiciens (Collège de ‘Pataphysique, Mille et une nuits n° 544, 2008; 128 p., 3,50 €).
Le cabinet de curiosités du notulographe.
Histoires de l’œil, photos de Pierre Cohen-Hadria.
Nantes (Loire-Inférieure), 14 octobre 2020
Asnières (Hauts-de-Seine), 26 janvier 2019
SAMEDI.
Films vus.
- Le Jour et l’Heure (René Clément, France – Italie, 1963)
- Alliés (Allied, Robert Zemeckis, R.-U. – É.-U., 2016)
- Le Toubib (Pierre Granier-Deferre, France, 1979)
- Ange (Angel, Ernst Lubitsch, É.-U., 1937).
Football.
SA Spinalien – Beauvais 0 – 1.
L’Invent’Hair perd ses poils.
Salons d’actualité.
Brive-la-Gaillarde (Corrèze), photo de Bernard Cattin, 23 décembre 2019
Paris (Seine), rue du Faubourg-Saint-Martin, photo de Pierre Cohen-Hadria, 17 janvier 2018
IPAD (Itinéraire Patriotique Alphabétique Départemental).
7 mars 2021. 137 km. (40 253 km).
181 habitants
Le monument, dressé au pied de l’église, est d’inspiration antique. Je ne pense pas avoir déjà rencontré ce genre d’architecture funéraire, néoclassique peut-être. Deux colonnes échappées d’un temple grec sont plantées sur une esplanade dont les coins portent des ogives d’obus. Un chapiteau domine un mur sur lequel les noms sont inscrits en grosses capitales.
Aux Héros de Senaide
1914-1918
Général MENESTREL Frédéric
Suivent 33 noms sur deux colonnes, de BRISSEY Gabriel à FLORIOT Achille (Syrie 1921).
Poil et plume.
“Un après-midi, à la maison Cotter, elle produisit une pochette en suède fermée au milieu par une lanière en cuir, la défit, puis la posa sur le matelas et exposa une batterie d’instruments de barbier étincelants, ciseaux, rasoir à manche, peignes en écaille et tondeuse argent rutilante avec un double jeu superposé de petites dents extrêmement bien aiguisées. Cette affaire était une sorte de grand frère de l’étui à manucure que Billy m’avait offert à Noël. Mme Gray avait suivi un cours de coiffure dans le temps, me confia-t-elle, et coupait les cheveux de tout le monde chez elle, même les siens. Malgré mes gémissements plaintifs – comment allais-je expliquer ça à ma mère ? –, elle m’obligea à m’asseoir dans un vieux fauteuil en osier du porche ensoleillé et s’attaqua à ma tignasse hérissée avec une célérité de professionnelle, chantonnant entre ses dents pendant qu’elle s’activait. Lorsqu’elle eut terminé, elle me permit de me regarder dans le miroir miniature de son poudrier; je ressemblais à Billy. Quant à ma mère, puisque nous y sommes, je n’aurais pas dû me tracasser car, dans sa confusion habituelle, elle ne remarqua même pas mes cheveux étonnamment tondus – c’était bien d’elle, franchement.” (John Banville, La lumière des étoiles mortes)
Bon dimanche,
Philippe DIDION
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