26 juin 2022 – 976

MERCREDI.                 

Éphéméride.

“Vendredi 22 juin 1906.

Cela fait maintenant deux ans que le christianisme a repris, en Russie, et avec assiduité, le genre de massacres et de mutilations qui lui ont permis de siècle en siècle depuis mille neuf cents ans de persuader la chrétienté qu’il est l’unique et vraie religion – la seule vraie religion de paix et d’amour. Depuis deux ans maintenant, le gouvernement ultra-chrétien de la Russie a officiellement ordonné et conduit les massacres de ses sujets juifs. Ces massacres sont tellement fréquents que nous y sommes presque devenus indifférents. Les comptes rendus de ceux-ci nous affectent à peine plus qu’une razzia sur les actions du chemin de fer alors que nous n’avions rien investi. Nous nous sommes tellement habitués à la description de ces horreurs que nous avons plus ou moins cessé de frissonner en les lisant.” (Mark Twain, L’Autobiographie de Mark Twain : L’Amérique d’un écrivain)                 

Lecture.

Histoires littéraires n° 82 (Du Lérot éditeur, avril-mai-juin 2020; 200 p., 25 €).

Jean Cocteau – Publicités – Myriam Boucharenc – Maurice Carême – Les frères Galignani philanthropes.

VENDREDI.                 

Le cabinet de curiosités du notulographe.

Menu carné.

Villeurbanne (Rhône), photo de Bernard Gautheron, 9 novembre 2018

Xonrupt-Longemer (Vosges), photo de l’auteur, 30 avril 2018

SAMEDI.            

Films vus.

  • N’oublie pas que tu vas mourir (Xavier Beauvois, France, 1995)
  • Drive My Car (Doraibu mai kâ, Ryûsuke Hamaguchi, Japon, 2021).

Bestiolaire de Saint-Jean-du-Marché.

Identification d’un Moro-sphinx, d’un Leste fiancé, d’un Bourdon des pierres et, merveille devenue si rare que je pensais ne jamais la voir, d’un Machaon. Riche journée.            

L’Invent’Hair perd ses poils.

Vandœuvre-lès-Nancy (Meurthe-et-Moselle), photo de l’auteur, 30 mai 2012

Saint-André-les-Vergers (Aube), photo de Catherine Stavrinou, 18 janvier 2014            

IPAD (Itinéraire Patriotique Alphabétique Départemental).

14 juillet 2021. 159 km. (41 027 km).

140 habitants

La stèle se dresse contre la façade de la Mairie. Pas le temps de la détailler, il pleut des cordes. Je prends les photos en espérant que je pourrai déchiffrer les noms dont les lettres ont pour grande partie perdu leur dorure.

La commune de

Sionne

À ses enfants

Morts pour

La France

1914-1918

1939-1945

Droite :

ÉTIENNE Auguste

FERRY Louis

POTTIER Fernand

LOUDENOT Louis

Gauche :

CHARLICANNE Maurice

CIEAUX Ernest

DINE Léon

ÉTIENNE André

Poil et pellicule.

Logan Lucky (Steven Soderbergh, É.-U. – Chine, 2017)

Bon dimanche,

Philippe DIDION

19 juin 2022 – 975

LUNDI.

Lecture.

Journal de 5 à 7 (René Fallet, Éditions des Équateurs, 2021; 464 p., 21 €).

Les trois volumes des Carnets de jeunesse de René Fallet, publiés entre 1990 et 1994, couvraient les années 1947-1950. Il y a ensuite un trou, car ce Journal ne commence qu’en 1962 (avec toutefois quelques notes datant des années 1950), reste à savoir si ce trou sera comblé un jour. En attendant, voici les vingt et une dernières années de l’écrivain bourbonnais vues par lui même, et c’est déjà considérable. En 1964, l’actrice Corinne Marchand est pressentie pour tenir le rôle principal du film Les Pas perdus, d’après son roman paru en 1954. L’actrice ne laisse pas Fallet indifférent. Du coup, du 8 au 12 mars, il va la voir à trois reprises dans Cléo de 5 à 7 d’Agnès Varda. Corinne Marchand n’aura pas le rôle (Michèle Morgan la supplantera), René Fallet n’aura pas son histoire d’amour avec elle mais il a trouvé le titre de son journal. Celui-ci mêle les aventures littéraires, sentimentales et amicales de l’auteur, qui se reconnaît deux mentors : Paul Léautaud pour l’écriture et Georges Brassens pour le compagnonnage. Toujours en 1964, il reçoit le Prix Interallié pour Paris au mois d’août, prix synonyme d’une aisance financière que consolidera le succès des romans qui suivront, d’Un idiot à Paris à La Soupe aux choux. Fallet travaille vite, trois semaines lui suffisent pour venir à bout d’un livre, il lui reste du temps pour goûter les plaisirs de la vie. Sans qu’il en soit pour autant satisfait : le journal est le plus souvent pessimiste, voire plaintif, notamment à cause d’histoires d’amour qui finissent mal et dont il tirera ses livres les plus noirs, L’Amour baroque en tête. Mais il y a le Bourbonnais, Thionne puis Jaligny où il se fait construire la maison de la rue du Loup, les copains, les boules, le vélo, la bouteille qui lui permettent de tutoyer le bonheur lorsqu’il y séjourne. Mais à raison de trois paquets de pipes par jour, les éponges s’encrassent vite et la maladie survient. À partir de 1975, on ne compte plus que trois ou quatre pages par an dans le journal, même si la production romanesque reste présente. La dernière entrée porte la date du 14 juin 1983, Fallet mourra le 25 juillet. À l’hôpital, m’a dit Agathe Fallet, l’un de ses derniers visiteurs fut Louis de Funès. Peut-être l’a-t-il fait rire une dernière fois.

MERCREDI.                  

Éphéméride.

À Madame de Grignan

“À Vichy, lundi 8e juin [1676]

Hélas ! ma très chère et bonne, n’en doutez pas que je ne sois touchée très sensiblement de préférer quelque à vous qui m’êtes si chère et que j’aime si parfaitement. Toute ma consolation, c’est que vous ne sauriez douter de mes sentiments, et que vous verrez un beau sujet de faire votre réflexion de l’autre jour sur la préférence du devoir sur l’inclination; en voici un bel exemple, ma bonne, et je vous conjure, et M. de Grignan, de vouloir bien me consoler de cette violence qui coûte si cher à mon cœur. Voilà donc ce qui s’appelle la vertu et la reconnaissance; je ne m’étonne pas si l’on trouve si peu de presse dans l’exercice de ces belles vertus. Je n’ose, en vérité, appuyer sur ces pensées; elles troublent entièrement la tranquillité qu’on ordonne en ce pays. Je vous conjure donc, une bonne fois, de vous tenir pour toute rangée chez moi, comme vous y étiez, et de croire encore que voilà précisément la chose que je souhaite le plus fortement.” (Madame de Sévigné, Lettres choisies)                 

Lecture.

Trillium (Jeff Lemire, Vertigo, 2014 pour l’édition originale, Urban Comics, 2014 pour l’édition française, traduit de l’anglais par Benjamin Rivière; 216 p., 20 €).                       

“Katina” (“Only This”, Roald Dahl, in Ladies’ Home Journal, septembre 1944 pour l’édition originale, in À tire-d’aile, Julliard, 1976 pour la traduction française, traduit de l’anglais par Jean Malignon, rééd. in “Contes de l’inattendu : nouvelles, romans, récits”, Gallimard, coll. Quarto, 2021; 1568 p., 32 €).                       

Nouvelle.                       

“L’Heure du wub” (“Beyond Lies the Wub”, Philip K. Dick, in Planet Stories, juillet 1952, traduit de l’américain par Pierre-Paul Durastanti et révisé par Hélène Collon, in “Nouvelles complètes I 1947-1953”, Gallimard, coll. Quarto, 2020; 1280 p., 28 €).

Nouvelle.

JEUDI. 

Brève de trottoir.

Courriel.

Une demande d’abonnement aux notules.

VENDREDI.

Lecture.

Parlez-moi d’amour (What We Talk About When We Talk About Love, Raymond Carver, Knopf, 1981 pour l’édition originale, Mazarine, 1986 pour la traduction française, rééd. Librairie Générale Française, coll. Le Livre de poche biblio n° 3137, 1993, traduit de l’américain par Gabrielle Rolin; 160 p., s.p.m.).

À force d’entendre nombre d’écrivains (Philippe Djian en tête) se réclamer de Raymond Carver, j’avais envie depuis un moment de découvrir ses nouvelles. Celles qui sont rassemblées ici tournent autour du couple, un couple le plus souvent en souffrance, voire en rupture. Plus que des nouvelles construites comme un tout narratif avec un début, un milieu et une fin, ce sont des instantanés, des moments de vie, des épiphanies que donne à voir Carver : pas de conclusion, encore moins de chute, les personnages sont laissés en plan à la dernière ligne et c’est au lecteur d’imaginer ce que sera la suite de leur parcours. C’est très noir, très subtil, écrit avec une grande économie de moyens et digne, effectivement, de servir de modèle.

Le cabinet de curiosités du notulographe.

Presse : titres percutants, collection de l’auteur.

L’Écho des Vosges, 18 mars 2021

Vosges Matin, 16 avril 2021

SAMEDI.

Vie littéraire.

Retour à la normale à Jaligny-sur-Besbre (Allier) pour le Prix René-Fallet après deux éditions tronquées pour cause de virus. C’est un plaisir de retrouver, après le gymnase surchauffé de l’an dernier, le cadre habituel et mes amies du coin, Agathe en tête. L’attribution du prix à Barcella, pour son roman Les Papillons (une prose faite d’alexandrins raboutés, comme dans L’Honneur de Pédonzigue de Roger Rabiniaux qui date tout de même de 1951), en paraîtrait presque anecdotique. Ma préférence allait à Aussi riche que le roi, d’Abigail Assor, mais je ne gagne jamais à ce jeu-là. Et puis Barcella est bien sympathique, il paraît qu’il est aussi chanteur, très à l’aise avec le public assurément. Comme chaque année, il fait beau à Jaligny, et puis Caroline m’accompagne, les soucis s’éloignent, je biche.

Films vus.

  • L’Homme de la cave (Philippe Le Guay, France, 2021)
  • Chérie, je me sens rajeunir (Monkey Business, Howard Hawks, É.-U., 1952)                              
  • Yoyo (Pierre Étaix, France, 1965)                              
  • Le Maître-nageur (Jean-Louis Trintignant, France, 1979)                              
  • Sans un bruit 2 (A Quiet Place Part II, John Krasinski, É.-U., 2020).             

Invent’Hair, bilan d’étape.

Bilan établi au stade de 5 400 salons, atteint le 15 septembre 2021.

Bilan géographique.

Classement général par pays.

  • 1. France : 4 511 (+ 84)
  • 2. Espagne : 179 (=)
  • 3. Royaume-Uni : 110 (=)
  • 4. Belgique : 82 (+ 4)
  • 5. Italie : 63 (+ 2)
  • 6. États-Unis : 45 (=)
  • 7. Suisse : 40 (+ 2)
  • 8. Portugal : 37 (=)
  • 9. Allemagne : 36 (+ 1)
  • 10. Danemark : 34 (=)

En dehors du top 10, notons la progression des Pays-Bas (14e) qui gagnent 6 places avec 5 nouveaux salons.

Classement général par régions (France).

  • 1. Rhône-Alpes : 731 (+ 10)
  • 2. Île-de-France : 730 (+ 19)
  • 3. Languedoc-Roussillon : 355 (=)
  • 4. Provence-Alpes-Côte-d’Azur : 352 (=)
  • 5. Lorraine : 337 (+ 9)
  • 6. Midi-Pyrénées : 243 (+ 4)
  • 7. Bretagne 184 : (+ 2)
  • 8. Pays de la Loire : 182 (+ 4)
  • 9. Centre : 179 (+ 8)
  • 10. Bourgogne : 169 (+ 7)

Pas de changement dans le classement général mais la 1re place de Rhône-Alpes ne tient plus qu’à un cheveu.

Classement général par départements (France).

  • 1. Seine (Paris) : 580 (+ 16)
  • 2. Rhône : 341 (+ 1)
  • 3. Vosges : 181 (+ 5)
  • 4. Loire-Atlantique : 135 (+ 3)
  • 5. Hérault : 112 (=)
  • 6. Alpes-Maritimes : 103 (=)
  • 7. Meurthe-et-Moselle : 100 (+ 2)
  • 8. Loire : 98 (+ 5)
  • 9. Pyrénées-Orientales : 96 (=)
  • 10. Bouches-du-Rhône : 92 (=)

La Loire passe devant les Pyrénées-Orientales.

Classement général par communes.  

  • 1. Paris : 580 (+ 16)
  • 2. Lyon : 161 (+ 1)
  • 3. Nantes : 68 (=)
  • 4. Nice : 59 (=)
  • 5. Barcelone : 58 (=)
  • 6. Nancy : 54 (=)
  • 7. Épinal : 48 (+ 1)
  • 8. Marseille : 32 (=)
  • 9. Dijon : 28 (+ 6)
  • 10. Strasbourg : 27 (=)

Dijon entre dans le top 10 et en expulse Toulouse, Villeurbanne et Le Havre. 31 communes arrivent dans le classement, portant le total à 1 877. Meilleure entrée : Les Andelys, à la 195e place avec 4 salons.

Bilan humain.

  • 1. Jean-Damien Poncet : 582 (+ 18)
  • 2. Philippe Didion : 410 (+ 6)
  • 3. Pierre Cohen-Hadria : 391 (+ 6)
  • 4. François Golfier : 341 (+ 2)
  • 5. Jean-Christophe Soum-Fontez : 169 (+ 1)
  • 6. Sylvie Bernasconi : 158 (=)
  • 7. Hervé Bertin : 146 (+ 2)
  • 8. Bernard Cattin : 133 (+ 8)
  • 9. Jean-François Fournié : 114 (+ 11) 
  • 10. Benoît Howson : 88 (=)

Pas de changement dans le top 10.

Étude de cas. Poésie de salon.

  Saint-Cergue (Suisse), photo de Sylvie Bernasconi, 6 juin 2018

Dunkerque (Nord), photo d’Alain Hardebolle, 7 août 2020

  Paris (Seine), photo de Christiane Larocca, 3 avril 2013

idem, rue Lamartine, photo de Jean-Christophe Soum-Fontez, 29 septembre 2018

Barcelone (Espagne), photo d’Alain Mathieu, 25 avril 2012

Poil et plume.

“Alors il va chez le coiffeur, se fait couper les cheveux, assez court pour ressentir un véritable malaise quand il contemple le résultat, comme s’il était étranger à lui-même, reconnaissant son visage mais pas l’identité qu’il s’était construite, sans s’en rendre compte, années après années, et se laisse payer un costume-cravate par le ministère de l’Intérieur.” (Laurent Binet, La Septième Fonction du langage)

DIMANCHE.

Vie des objets.

Les anciens entrepôts de Manufrance abritent désormais la Cité du design à Saint-Étienne (Loire). Nous y sommes pour visiter la Biennale internationale dudit design, à la découverte d’un nouveau lieu et d’un nouveau domaine artistique. Jusqu’à une époque récente, le design, c’était en gros synonyme de plastique. Cette matière étant aujourd’hui honnie, les créateurs ont suivi l’air du temps et on ne voit, dans les bâtiments de la Manu, que des objets en matériaux recyclés, naturels, biologiques : on fait des briques avec de l’urine, des sièges à partir de compost, des vélos en bois, ce genre de choses. Je suis particulièrement attentif au travail de Mathilde Pellé, un projet intitulé “Maison Soustraire” qui présente des objets et des restes d’objets obtenus après qu’elle eut décidé de retirer deux tiers de la matière de chacun de ceux qui occupaient son intérieur. J’ai dit l’autre jour que je n’avais pas de projet pour ma retraite. En fait, j’en ai un, très simple : celui de ne laisser à ceux et celles qui resteront après moi que le minimum de choses à débarrasser. C’est une préoccupation qui ne date pas d’hier et dont je m’étais ouvert dans une ancienne notule que je reproduis ici : “J’aide le père de R. à faire le tri dans ses bouquins. Le cauchemar d’avoir à vider la maison d’un mort, il y a eu un roman là-dessus il y a un ou deux ans, Comment j’ai vidé la maison de mes parents, quelque chose comme ça. Cauchemar de plus en plus présent, avec la volonté de ne pas imposer ça à ceux qui me survivront, le souhait d’arriver au moment final, s’il ne survient pas brusquement, à l’issue d’un lent processus de dépouillement progressif, d’une asymptote soigneusement entretenue. L’idéal : ne laisser, au final, qu’un disque dur effaçable, un livre entamé, une brosse à dents et le pyjama de l’hospice.” (n° 317, 2 septembre 2007). Dans ce but, j’ai entrepris de me débarrasser, à partir du 1er juin dernier, d’un objet par jour. Un objet petit ou gros, précieux ou sans valeur, qui sera donné, jeté, détruit – en tout cas pas vendu, je suis incapable de vendre quoi que ce soit. Le processus est engagé, on verra ce que ça donne.                    

Lecture.

Le Sommet des Dieux 3 (Kamigami no itadaki, Jirô Taniguchi, Baku Yumemakura, Shūeisha Inc., 2002 pour l’édition originale, Kana, 2010 pour la traduction française, traduit et adapté du japonais par Sylvain Chollet; 338 p., 18 €).

MARDI.

Devoirs de vacances.

Je relis le fichier du Bulletin de l’Association Georges Perec n° 80 et l’envoie à la mise en page.

MERCREDI.                   

Éphéméride.

“Rome, 15 juin 1834.

Page 9. Et l’on permet le serment !

9, 39. Guerre impossible. Chrétiens conquis sur-le-champ.

9, 1. Mercenaire. La religion n’est qu’un marché.

Page 10, 13. Pater adouci. Vérifier cela; c’est décisif pour cette traduction : et ne nos INDUCAS in tentationem. M. de Sacy dit : ne nous abandonnez point à la tentation au lieu de “ne nous induisez point”, etc.” (Stendhal, Journal)

JEUDI.

Bestiolaire de vacances.

Identification d’une Punaise verte ponctuée.

VENDREDI.                  

Le cabinet de curiosités du notulographe.

Comment sonner les cloches en l’église de Malleret-Boussac (Creuse), photos de l’auteur, 5 août 2021.

SAMEDI.

Vie familiale.

Nous rentrons at home après un périple d’une semaine qui nous aura menés du Bourbonnais à la Haute-Savoie, en passant par le Forez et les Cévennes. Nous, c’est Caroline et moi, je le souligne parce que c’est la première fois que nous partons si longtemps sans les filles. Même quand elles eurent atteint l’âge de voler de leurs propres ailes, elles nous ont toujours accompagnés, sans contrainte, sur nos lieux de villégiature, oui, même en Creuse, oui, même et surtout en Creuse. Ce qui, à la fois, me ravit et me surprend dans la mesure où, dans ma jeunesse, le principal attrait des vacances était de pouvoir m’enfuir loin de mes parents.              

L’Invent’Hair perd ses poils.

Paris (Seine), boulevard Arago, photo de Pierre Cohen-Hadria, 27 mai 2012

Romorantin-Lanthenay (Loir-et-Cher), photo de l’auteur, 4 novembre 2012             

Poil et pellicule.

Mise à mort du cerf sacré (The Killing of a Sacred Deer, Yorgos Lanthimos, Irlande – R.-U., 2017)

Bon dimanche,

Philippe DIDION

5 juin 2022 – 974

N.B.

Le prochain numéro des notules sera servi le dimanche 19 juin 2022.

LUNDI.          

Lecture.

The Cool Man (William R. Burnett, Fawcett, 1968 pour l’édition originale, Gallimard, coll. Série Noire n° 1269, 1969 sous le titre Un homme à la coule pour la traduction française, rééd. coll. Quarto, “Underworld : romans noirs”, 2019, traduit de l’américain par Denise May, révisé par Marie-Caroline Aubert; 1120 p., 28 €).

Mes notes de 1985, date de ma première lecture de ce livre en Série Noire, ne sont guère indulgentes : intrigue embrouillée, personnages sans épaisseur et mal définis… C’est vrai que l’histoire n’est pas très claire, qu’on a du mal à déterminer qui est qui dans celle-ci mais tout n’est pas à jeter, loin de là. Le personnage de Willie Madden, un braqueur recherché à la fois par la police et par ses complices, présente un profil intéressant. Il retrouve par hasard sa fille, abandonnée à sa naissance et devenue adulte, dont il tombe amoureux. L’ombre de l’inceste qui plane sur leur relation, un thème peu fréquent dans ce genre de littérature, donne son originalité au roman.

MERCREDI.                 

Éphéméride.

“Dimanche 1er juin [1941]

Ainsi donc, “le printemps 1941” – dont nous redoutions tellement qu’il ne nous apporte de nouvelles catastrophes, si ce n’est la catastrophe finale –, ce printemps s’est achevé. Et pourtant nous sommes encore là ! Nous vivons encore, nous sommes encore debout, rien d’irréparable ne s’est produit. Je me demande s’il est vrai qu’il est passé facilement ou si, parce que nous en voyons le bout, nous avons l’impression trompeuse qu’il a finalement été supportable. (Hélas ! tout est supportable.) Si, le 1er mars, quelqu’un nous avait dit qu’au cours du printemps la Bulgarie serait occupée, la Yougoslavie anéantie, la Cyrénaïque à nouveau cédée, la Grèce vaincue, la Crète évacuée, peut-être la perspective de tant de défaites nous aurait-elle paru désastreuse. Mais aujourd’hui, après coup, tout cela a perdu de son importance. Au fond, encore et toujours, la seule chose qui compte, c’est que nous restions debout. Aussi longtemps que l’Angleterre ne capitule pas, on peut espérer.” (Mihail Sebastian, Journal 1935-1944)

Vie professionnelle (fin).

C’est aujourd’hui que je passe du statut de salarié à celui de pensionné. Je l’ai espérée, attendue, rêvée, cette date du 1er juin, l’imaginant comme une rupture succédant à une litanie de dernières fois que je me voyais célébrer comme autant de pas en avant vers la libération finale : c’est la dernière fois que je prends le 7 heures 43, c’est la dernière fois que j’assiste à un conseil de classe, la dernière fois que je lis ce texte ou vois ce film, la dernière fois que je subis ce butor ou cette pintade, c’est ma dernière copie, ma dernière sieste sur ma chauffeuse, c’est mon dernier cours. Mon opération et ses suites auront empêché cette rupture et cette litanie, qui m’aurait sans doute attristé. J’ai gagné une année sur le programme prévu, une année pas toujours facile à vivre mais c’est toujours bon à prendre. Je ne me suis jamais illusionné sur un changement de vie radical : je n’ai pas de projet – à part celui, peut-être, d’acheter un téléphone de poche mais je ne sais pas vraiment ce que j’en ferais –, je n’ai pas d’envie de voyager, de déménager, de me mettre au triathlon ou à l’aquarelle. Et j’ai bien fait : le temps passé au boulot devenu vacant a été rapidement rempli sans que mon mode de vie en soit particulièrement affecté. Je ne me lève pas plus tard, je ne lis pas plus de livres, je ne vois pas plus de films, je n’ai pas pris de poids, je me rase et je change de chemise tous les matins. L’emploi du temps a cependant changé, le début de ma période d’inactivité ayant coïncidé avec le déclin rapide de la santé physique et morale de nos parents, à Caroline et à moi. L’un d’eux nous a quittés récemment, les autres nécessitent une attention et un soin qui nous accaparent durablement, ça suffit pour l’instant à meubler nos existences.

caricature d’élève, année scolaire 2020-2021

Lecture.

Brassens : des souvenirs trop beaux pour moi (Agathe Fallet, Éditions des Équateurs, 2021; 128 p., 18 €).                               

Dans Étonnez-moi Benoît, l’émission qu’il présente sur France Musique, Benoît Duteurtre invite régulièrement des chanteurs et chanteuses du temps passé à raconter leurs souvenirs. Agathe Fallet n’est pas chanteuse mais suite à son mariage avec René Fallet en 1956, elle a côtoyé toute sa vie ce qui se faisait de mieux dans le genre, à commencer par Georges Brassens, le meilleur ami de l’écrivain. À plusieurs reprises, j’ai suggéré à Benoît Duteurtre de faire venir Agathe Fallet à son micro. Las, il a fait, jusqu’à ce jour, la sourde oreille et si jamais il se décidait à changer d’avis, il ferait bien de se hâter : Agathe est née en 1939 et n’est pas éternelle. Heureusement, elle a pris les choses en main et s’est décidée à confier dans un livre quelques bribes de cette époque. Photos et souvenirs inédits, touchants, d’une jeune fille puis d’une femme qui devait se pincer pour croire à la place “unique et privilégiée” qu’elle occupait dans ce milieu. Brassens est mort en 1981, Fallet est mort peu après, Agathe a toujours bon pied bon œil et j’ai hâte de la retrouver, comme chaque année, à Jaligny-sur-Besbre (Allier) à l’occasion du Prix René-Fallet qui sera décerné dans une dizaine de jours.

JEUDI. 

Brève de trottoir.

          Presse.

Et ça ne fait pas deux jours que je suis parti…

VENDREDI.

Le cabinet de curiosités du notulographe.

Vestiges postaux, photos de l’auteur.

Cindré (Allier), 27 décembre 2020

Anzême (Creuse), 6 août 2021

SAMEDI.            

Films vus.

  • Demain tout commence (Hugo Gélin, France – R.-U., 2016)
  • Tout nous sépare (Thierry Klifa, France, 2017)
  • L’Héritier des Mondésir (Albert Valentin, France – Allemagne, 1940)
  • No Sudden Move (Steven Soderbergh, É.-U., 2021)                             
  • Mensonges et trahisons et plus si affinités… (Laurent Tirard, France, 2004)                             
  • Enragé (Unhinged, Derrick Borte, R.-U. – É.-U., 2020)                             
  • La Captive aux yeux clairs (The Big Sky, Howard Hawks, É.-U., 1952).            

L’Invent’Hair perd ses poils.

Saint-Amand-en-Puisaye (Nièvre), photo de Pierre Cohen-Hadria, 27 mai 2012

Lodève (Hérault), photo de Jean-Damien Poncet, 23 septembre 2020

IPAD (Itinéraire Patriotique Alphabétique Départemental).

4 juillet 2021. 108 km. (40 868 km).

90 habitants

Au sommet du village, au milieu des tables de pique-nique, un monument pimpant, à l’ombre des tilleuls. La fontaine fait glouglou, les bacs ne sont pas fleuris mais plantés de figurines animales aux couleurs vives (perroquet, grenouille, flamant rose…). On s’attendrait presque à trouver sur l’obélisque une citation du genre “Ah Dieu que la guerre est jolie” ou “Les obus jouaient à pigeon vole” mais il n’en est rien.

La commune de Serocourt reconnaissante

Aux morts

Pour la Patrie

1914-1919

Guerre 1914-1919

BOULANGER Gabriel

BARRAT Clément

VALANTIN Émile

LECLERC Éloi

BOURGEOIS Achille

ROLIN Georges

LINARD Jules

BOURCIER André

GÉNION Ernest

COLLOT André

Guerre 1939-1945

COLLIN Lucien            

Poil et pellicule.

Le Mouton enragé (Michel Deville, France – Italie, 1974)

Bon dimanche,

Philippe DIDION