26 mars 2023 – 1007

DIMANCHE.                  

Lecture.

Gaston d’Ercoule (Valery Larbaud, Éditions Vrille, 1952, rééd. in “Œuvres”, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade n° 126, 1958; 1316 p., 52,99 €).

“La femme du professeur, aussi, est en bon point”, écrit Larbaud. Le Trésor de la langue française m’apprend que l’embonpoint d’aujourd’hui est issu de cette expression qui signifiait jadis “en bonne santé”.

LUNDI.

Transhumance.

Alice a suivi son dernier cours samedi, quitté son statut d’étudiante et laissé son logement messin à Lucie. Elle va désormais exercer ses talents à Bruxelles, où nous débarquons en fin de journée pour prendre nos quartiers à Anderlecht. Anderlecht, pour moi, c’est le football, nous sommes d’ailleurs à portée de fumigène du stade. Un coup d’œil sur le calendrier… Mince, pas de match domicile cette semaine.

MARDI.

Chez les Belges.

Installation d’Alice dans son nouveau logis, à Schaerbeeck, arpentage du quartier, photos de salons et curiosités, ravitaillement. J’achète Le Soir, déception, il n’y pas d’avis de décès. J’essaierai demain La Libre Belgique. Après-midi touristique, à la découverte de Bruxelles. Nous prenons le métro à la station Saint-Guidon qui, c’est une bonne chose, se trouve sur la même ligne que la station Eddy Merckx. Le hasard nous mène sur la Grand-Place, puis au pied de la colonne du Congrès qui sert de monument aux morts, en passant par les galeries royales Saint-Hubert, là où Paul Verlaine acheta, le 10 juillet 1873, certain objet qui allait être à l’origine d’un sacré coup de pétard. Promenade agréable mais le cœur n’y est pas, les nouvelles de Metz ne sont pas bonnes.

MERCREDI.                 

Éphéméride.

“Lundi 22 mars [1943]

Marine de 9h1/2 à 12h. Passé à Comœdia. Vu personne. Rabourdin m’a fait vendre 800 francs mes Ronsard de la Pléiade. Un coup de téléphone de Reyer me demandant de venir à 3h à l’imprimerie de La Gerbe, 16 rue du Croissant, parce que mon récit sur Dominique de Gourgue doit paraître, qu’il y a des coupures à faire, et qu’il veut mon avis. Je demande mon après-midi à Braibant. Allé chez le percepteur toucher mes 570 francs de prime de constat et allé à pied rue du Croissant, par un temps inouï de douceur.” (Jacques Lemarchand, Journal 1942-1944)                 

Chez les Belges.

Poursuite du circuit touristique avec la visite des Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique (découverte d’un certain Léon Frédéric qui rappelle étrangement Émile Friant et Bastien-Lepage) et la Bibliothèque royale. Pendant ce temps, Lucie est admise à l’hôpital de Mercy à Metz. Inutile d’écourter notre séjour, les visites ne sont pas autorisées.

JEUDI.

Chez les Belges.

La visite du Muséum des sciences naturelles, dont la signalétique restera toujours pour nous un mystère, nous rassure sur la vitalité et la vigueur des cordes vocales de l’écolier belge. Nous arpentons Ixelles où les cafés proposent l’expresso à 3 euros, récupérons Alice satisfaite de sa première journée de labeur et visitons la famille de mon frère à Rhode-Saint-Genèse. Volière locale. Je photographie un couple de Pies bavardes au nid et une Ouette d’Égypte dans le parc du Muséum.

VENDREDI.

Vie familiale.

Nous quittons Bruxelles pour Metz, rassemblons quelques affaires et papiers dans l’appartement de Lucie, assurons quelques démarches administratives en ville et à l’hôpital où nous montons en début d’après-midi. Une interne bienveillante nous explique la situation, qui est encore incertaine. Nous sommes dans le couloir, à deux pas de la chambre de Lucie mais les visites restent interdites. Nous repartons avec l’espoir de la voir la semaine prochaine. Le soir venu, nous regardons un épisode de la série Hippocrate, histoire de rester dans l’ambiance. C’était ça ou relire La Montagne magique.                 

Le cabinet de curiosités du notulographe.

Ferronnerie dard.

Renaix (Belgique), photo de Monique Carlier, 2 mars 2021

Nantes (Loire-Inférieure), photo de Christophe Hubert, 10 janvier 2021

SAMEDI.             

Film vu.

Mission : Impossible – Protocole fantôme (Mission: Impossible – Ghost Protocol, Brad Bird ,É.-U., 2011).             

Lecture.

Histoires à lire et à pâlir (Death-Reach,Collectif, Davis Publications, 1982 pour l’édition originale, Pocket, 1983 pour la traduction française, rééd. in « Alfred Hitchcock présente : 100 autres histoires extraordinaires », Presses de la Cité, coll. Omnibus, 1995; 1224 p., 145 F). 

Nouvelles.

Vie littéraire.

Nous restons à Metz, même si ça ne sert à rien. J’achète le nouveau livre de Pierre Michon, sans savoir si je l’ouvrirai un jour. Michon, couvert de prix et de louanges à chaque pas qu’il fait et à chaque ligne qu’il écrit, est devenu la statue du Commandeur des lettres. On n’imagine plus tenter un mot un peu tiède sur l’homme ou l’œuvre. Et si le bouquin, tant attendu, était finalement décevant ? Je n’y crois guère, j’ai confiance, mais comme l’écrit aujourd’hui Jean-Claude Bourdais dans un billet, si c’est le cas personne n’osera le dire. Avant de rentrer, nous faisons une courte incursion au Petit Salon du livre de Kanfen (Moselle). Le rassemblement d’auteurs locaux fait penser à celui de Felletin (Creuse), Raymond Poulidor en moins. Nous y faisons la connaissance de l’alerte Nicolas Turon, auteur de petites plaquettes policières sur tous les bleds de Moselle et des alentours, qui nous confie son intention de sévir bientôt sur Épinal.             

L’Invent’Hair perd ses poils.

Badonviller (Meurthe-et-Moselle), photo de Francis Henné, 27 juillet 2012

Laragne-Montéglin (Hautes-Alpes), photo d’Hervé Bertin, 17 avril 2016

Poil et pellicule.

L’Étrange Histoire de Benjamin Button (The Curious Case of Benjamin Button, David Fincher, É.-U., 2008)

Bon dimanche,

Philippe DIDION

19 mars 2023 – 1006

DIMANCHE.

Lecture.

Le Matin des origines (Pierre Bergounioux, Verdier, 1992; 64 p., 9 €).

Nous voici à un tournant du parcours de Bergounioux. Avec Le Matin des origines, il se détourne de Gallimard (il y reviendra) et abandonne le roman (il y reviendra) pour se tourner vers le récit court qui, à l’exception des volumineux Carnets de notes, sera sa marque de fabrique. Désormais, il fera preuve d’un nomadisme éditorial peu commun, livrant ses textes tantôt à des grandes maisons (Nathan, L’Oliver, Fayard) ou à des structures plus modestes (Galilée, Cécile Defaut), tantôt à d’obscures boutiques au nom de coopératives bio (À une soie, Les Prairies ordinaires, L’Atelier du grand tétras), tout en privilégiant les amis de William Blake & Co., Fata Morgana et Verdier. Verdier qui, en publiant au tournant des années 2000 François Bon, Pierre Michon, Bergounioux et Mathieu Riboulet, fera preuve d’une rare cohérence éditoriale. Le Matin des origines revient sur les racines lotoises de l’auteur, sur la maison rose qui fut le titre d’un de ses premiers romans. L’abord est toujours ardu, la phrase tortueuse, et il convient d’être vigilant si l’on ne veut pas en être éjecté en cours de route. Mais il n’y a plus de déguisement, plus de masque, plus d’appareil fictionnel. Maintenant, c’est moi qui cause, c’est mon enfance, mes souvenirs, mes lieux, mes morts. C’est lui, c’est Bergou.

LUNDI.          

Vie familiale.

C’est une journée à haut potentiel festif puisque c’est celle où mes parents intègrent l’EHPAD où ils vont désormais couler leurs vieux jours. Ma mère y est déjà installée quand nous arrivons avec mon père, je ne verrai donc pas la chambre double qu’ils sont appelés à partager. Lui est ravi, l’établissement est bâti sur les hauteurs de la ville, au milieu des champs, c’est son quartier, là où il venait jouer enfant. Je laisse ma sœur et mon frère le conduire pendant que je m’occupe des formalités d’entrée. Auparavant, nous avons rassemblé ses affaires, son trousseau, embarqué des photos, des cadres, des objets familiers. Lui devant sa bibliothèque, regardant ses livres qu’il ne peut plus comprendre : “Alors je suis obligé de laisser tout ça ?” Je suis ému bien sûr, je ne verrai plus mon père à moins que son état de santé ou le veuvage ne le conduisent ailleurs. Ému, mais moins que je pouvais le redouter. Je suis avant tout soulagé, égoïstement d’abord parce que c’est pour moi la fin d’une longue période de tension épuisante, et puis aussi parce que je le sais maintenant en sécurité. Pour la première fois depuis bien longtemps, je respire.

MARDI.           

Vie familiale.

Comme je l’ai fait tous les jours ou presque ces temps-ci, je monte chez mes parents. C’est qu’il y a maintenant là-haut un tas de choses à faire, à ranger, à arranger dans la maison vide. En chemin, je m’aperçois que, pour la première fois depuis bien longtemps aussi, je fais le trajet sans la peur au ventre, la boule qui m’étreignait à l’idée de ce que j’allais trouver sur place ou de l’accueil qui allait m’être réservé. Non seulement je respire, mais je respire à pleins poumons.             

Lecture.

Tati filme (sous la direction d’Alison Castle, in “L’Intégrale Jacques Tati”, Taschen, 2019; 1136 p., 185 €).

Scénarios.

MERCREDI.                 

Éphéméride.

15 mars [1932]

Breakfast à la mission, pas mauvais. Coup d’œil sur l’arrière de la mission : ravin plein de palmiers, deux ou trois paillotes; sous la pluie qui tombe depuis ce matin, c’est (bien que nous soyons remontés un peu au nord) un coin de forêt vierge. Remerciements aux hôtes. Départ.

Autre type de villages : cases coniques à toits de paille très grands, bulbeux comme des coupoles d’églises russes. Quelques femmes ont le front bleui. Mais tout se civilise… Les enfants ne disent plus seulement bonjour; souvent, ils tendent la main. Sans doute des touristes leur ont-ils donné des sous.” (Michel Leiris, L’Afrique fantôme)

JEUDI.

Contrepèterie de trottoir.

VENDREDI.

Lecture.

M’appelle pas fillette! (The Deep, Mickey Spillane, 1961 pour l’édition originale, Le Cherche Midi, coll. “Borderline”, 2022 pour la traduction française, traduit de l’américain par Paul Marc-Ayre; 300 p., 15 €).

Curiosités.

De l’influence de la sécheresse sur le dynamisme commercial des villes de province.

Charmes (Vosges), photo de l’auteur, 1er juillet 2021

Dole (Jura), photo de Jean-François Fournié, 5 février 2022

SAMEDI.             

Films vus.

  • La Syndicaliste (Jean-Paul Salomé, France – Allemagne, 2022)                              
  • L’Habit vert (Roger Richebé, France, 1937)                              
  • Coupez (Michel Hazanavicius, France – É.-U. – R.U. – Japon, 2022)                              
  • Bullitt (Peter Yates, É.-U., 1968)                              
  • Les Tuche 4 (Olivier Baroux, France, 2021).                                          

L’Invent’Hair perd ses poils.

Badonviller (Meurthe-et-Moselle), photo de Francis Henné, 27 juillet 2012

Mers-les-Bains (Somme), photo de Gérard Viry, 27 décembre 2020

IPAD. (Itinéraire Patriotique Alphabétique Départemental).

1er mai 2022. 87 km. (42 028 km).

581 habitants

Une stèle de granit gris s’élève au pied de la Mairie. Pas de décoration, sinon une plaque ornée d’un cor de chasse et d’une palme. Les noms sont répartis sur quatre colonnes.

À nos morts

1914-1918

Colonne 1 : 1939-1945 : HOCQUAUX Camille, LASSAUCE Fernand, MARTIN Marie

Colonne 2 : 19 noms d’APTEL Albert à LAMBERT Émile

Colonne 3 : 19 noms de LECOMTE Georges à FALCH Émile

Colonne 4 : 5 noms de BOUILLET Pierre à PIERRE René Marcel.

Le monument est signé Marcadella – Thiéfosse.             

Poil et pellicule.

Robert et Robert (Claude Lelouch, France, 1978)

Bon dimanche,

Philippe DIDION

12 mars 2023 – 1005

MARDI.

Lecture.

Vercoquin et le plancton

(Boris Vian, Gallimard, 1946, rééd. in « Œuvres romanesques complètes I », Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade n° 562, 2010; 1312 p., 57,50 €).

C’était la fin des années 1970, on découvrait Boris Vian, souvent au lycée, et on s’apercevait avec délice que la littérature n’était pas forcément synonyme d’austérité et d’ennui. On pouvait assouvir sa curiosité parce qu’à ce moment-là, 10-18 rendait accessible en poche tout ce qu’avait écrit Bison Ravi. Ou presque tout. Pour des raisons qui nous échappaient, Vercoquin et le plancton était disponible mais ailleurs, en Folio. Je refusais de l’acheter pour ne pas casser mon bel alignement de 10-18 et ce n’est qu’aujourd’hui que je découvre cette histoire à la gloire du jazz et des surprises-parties qui est une sorte de préambule, dans l’écriture, à L’Écume des jours. Comme quoi tout arrive.

MERCREDI.                 

Lecture.

“Le Festival” (“The Festival”, Howard Phillips Lovecraft, 1922, Belfond pour la traduction française, rééd. in “Œuvres I”, Robert Laffont, coll. Bouquins, 1991, d’après la traduction de Paule Pérez; 1172 p., 31 €).

Nouvelle.                 

Éphéméride.

Dimanche 8 mars 1936. […] M’a marqué aussi son étonnement de ces gens qui attendent, je ne sais quel âge, pour savoir ce que c’est que l’amour : “Toi, par exemple, qui as attendu soixante ans pour savoir ce qu’est l’amour-passion.” Elle entend celui que j’ai pour elle. Je n’ai pas répondu. Mon amour pour elle, est-il bien différent, je ne dirais pas des précédents, mais de mon amour pour le Fléau ? Je n’ose prononcer le reste de sang-froid avec elle, comme je l’ai toujours été. Pas le moindre aveuglement, ni sur le moral, ni sur le physique. Alors ?” (Paul Léautaud, Journal particulier 1936)                  

Obituaire.

Ce n’est pas pour me vanter, mais j’ai tapé sur l’épaule de Marcel Amont, dont j’apprends la mort aujourd’hui. Je retrouve la date sur Internet, c’était en juin 1980, nous étions partis sur un coup de tête pour le rassemblement antinucléaire de La Hague (Manche), c’était loin, nous avions dormi à mi-chemin chez Albert Marcœur, “le Frank Zappa français”. Le Monde parlait à l’époque d’un “Woodstock à la française”, ce qui était sans doute abusif, même si un élément du festival historique était bien présent : la pluie. Une pluie torrentielle qui noya rapidement le site et obligea tout le monde à se réfugier à Sainte-Mère-Église où Jacques Higelin donna, jusqu’aux heures du petit matin, un concert mémorable. Outre Higelin, il y avait là le gratin du rock français de l’époque, je n’ai plus tous les noms en tête. Et puis Marcel Amont, égaré dans ce monde de brutes. C’est lui qui avait fait l’ouverture, sous les huées de la jeune assemblée, et il s’était fait rapidement éjecter. Moi, ça ne me dérangeait pas qu’il soit là, Marcel Amont n’était déjà plus tout neuf mais Brassens n’avait pas pour habitude de donner ses chansons à n’importe qui et il en avait offert une à Marcel Amont (“Le Chapeau de Mireille”), ça suffisait à me le rendre sympathique. Je ne sais plus comment je m’étais retrouvé en backstage, mais j’étais là quand Marcel Amont est descendu de la scène, effondré, réconforté par ses musiciens. Je m’étais approché, lui avais donc tapé sur l’épaule et dit ces mots historiques : “T’en fais pas Marcel, il n’y comprennent rien”. Je me souviens de son sourire navré.

JEUDI.         

Lecture.

Le Lieutenant Burda (Leutnant Burda, Ferdinand von Saar, in Deutsche Dichtung, 1887 pour l’édition originale, Bartillat, 2022 pour la traduction française, traduit de l’allemand par Jacques Le Rider; 128 p., 16 €).

Dans son article du Monde des livres rendant compte de la sortie de ce court roman, l’ami Denis Cosnard parlait à propos de Ferdinand von Saar d’un “Maupassant viennois”. Ce qui est tout à fait justifié si l’on considère la virtuosité narrative dont il fait preuve et le plaisir de lecture qu’elle procure. En plus, il y a l’atmosphère viennoise que l’on goûte chez Zweig, Roth ou Schnitzler, les bals, les cafés, les casernes, les officiers à lorgnon aux uniformes chamarrés et aux moustaches improbables. Dans ce cadre, le lieutenant Burda, qui ne se prénomme pas Nestor, vit une histoire d’amour à distance avec une belle qui n’est pas de son rang. Un amour unidirectionnel mais qu’il croit réciproque – et il est bien le seul. Dans son délire d’auto-persuasion, il voit se multiplier les preuves d’amour dans ce qui n’est qu’une accumulation de hasards, et les mises en garde du narrateur, son ami, ne suffiront pas à le détourner d’une issue fatale. Histoire tragique, menée d’une plume de maître, Maupassant n’aurait pas fait mieux.

Le Débat n° 210 (Gallimard, mai-août 2020; 288 p., 24 €).

“40 ans”

Gallimard fait le ménage dans ses revues : après Les Temps modernes, c’est Le Débat qui tire sa révérence suite à ce numéro anniversaire. Il reste la NRf, devenue semestrielle, et L’Infini à la publication irrégulière. C’est maigre.

VENDREDI.

Lecture.

Un Mexicain sur son vélo : et 119 autres droodles (Roger Price, Tallfellow Press, 2000 pour l’édition originale, La Table ronde, 2015 pour la traduction française, traduit de l’américain par Jean-Christophe Napias; 168 p., 12,90 €).

Dans sa présentation, Jean-Christophe Napias écrit que c’est Charlie mensuel qui, en 1969, publia les premiers droodles en France. Les légendes de ces énigmes dessinées par Roger Price étaient traduites par Delfeil de Ton. Je me souviens bien d’avoir découvert les droodles à cette époque mais je ne lisais pas Charlie, ce devait être dans Le Journal de Mickey. J’avais gardé en mémoire le Mexicain sur son vélo, qui donne son titre à cette rétrospective, et celui-ci, qui n’y figure pas :

Un Mexicain faisant cuire deux œufs sur le plat

Le cabinet de curiosités du notulographe.

Écriteaux divers.

 Chine, photo de Phillip Lund, 25 mars 2006

Nancy (Meurthe-et-Moselle), photo d’Alice Didion, 26 juin 2020

SAMEDI.

Bougies.

22 ans de notules. Elles nous enterreront tous.

Films vus.

  • La Rumeur (The Children’s Hour, William Wyler, É.-U., 1961)                              
  • Enquête sur un scandale d’État (Thierry de Peretti, France, 2021)                              
  • The Son (Florian Zeller, R.-U. – France, 2022)                              
  • Les Valeurs de la famille Addams (Addams Family Values, Barry Sonnenfeld, É.-U., 1993)                              
  • The Innocents (De uskyldige, Eskil Vogt, Norvège – Suède – Danemark – Finlande – France – R.-U., 2021)                              
  • Chut ! (Jean-Pierre Mocky, France, 1972)                              
  • Decision to Leave (Heojik kyolshim, Park-Chan-wook, Corée du Sud, 2022).             

L’Invent’Hair perd ses poils.

Lons-le-Saunier (Jura), photo de Francis Pierre, 25 juillet 2012

Cusset (Allier), photo de Jean-Damien Poncet, 18 avril 2022             

Poil et plume.

“Faute d’électricité, les coiffeurs travaillaient irrégulièrement, une mise en plis devenait tout une affaire, aussi les turbans étaient-ils à la mode : ils tenaient lieu à la fois de chapeau et de coiffure; j’en avais porté, de temps en temps, par commodité et parce qu’ils me seyaient; je m’y ralliai définitivement.” (Simone de Beauvoir, La Force de l’âge)

Bon dimanche,

Philippe DIDION

5 mars 2023 – 1004

DIMANCHE.

Lecture.

De beaux lendemains (The Sweet Hereafter, Russell Banks, Harper Collins, 1991 pour l’édition originale, Actes Sud, 1994 pour la traduction française, rééd. coll. “Babel” n° 294, 1997, traduit de l’américain par Christine Le Bœuf; 336 p., 9,20 €).

Ce roman sortirait aujourd’hui, on parlerait sans doute de résilience, puisqu’il s’agit, pour ses personnages, de vivre après un traumatisme (la mort d’un groupe d’enfants dans un accident de car scolaire). Comme il est aussi question d’une sorte de vengeance exercée par une rescapée sur la personne de son père incestueux, on parlerait aussi certainement de roman post #metoo. Dieu merci, Russell Banks a échappé à tout ça et on peut encore lire son livre, sans les étiquettes d’aujourd’hui, comme un roman simplement poignant et très bien construit. Le récit de l’accident est suivi de différents témoignages et tranches de vie (des parents privés de leurs enfants, un avocat se proposant de les défendre, une survivante, la conductrice du bus) qui s’enchaînent pour livrer le récit d’une ville entière. Il faudra revoir d’urgence le film d’Atom Egoyan tiré du livre dont, je l’avoue, je n’ai pas gardé un souvenir précis.

MERCREDI.  

Éphéméride.

“Vendredi 1er [mars 1918]. – Depuis que j’ai arrêté d’écrire ici j’ai connu des jours de santé presque parfaite, des jours de maladie, et des jours où j’ai été accablé par l’Humeur. Février a été très beau à Alicante, et j’ai eu des matinées merveilleuses, ces matinées sud-méditerranéennes, presque trop belles, qui font penser aux chansons napolitaines et à la mauvaise poésie allemande. Mais il semble que mars veuille nous faire payer tout ce bonheur et cette chaleur. Je ne me suis pas senti bien ni hier, ni aujourd’hui.” (Valery Larbaud, Journal)                 

Lecture.

Fête nationale et autres poèmes (Laurent Tailhade, Grasset, coll. “Les Cahiers rouges”, 2013; 112 p., 7,90 €).

On dirait bien que tout ce qui sort de Tarbes (Hautes-Pyrénées) ne peut laisser indifférent. Si l’on met de côté le maréchal Foch et Yvette Horner, on ne peut oublier que le lycée de la ville forma Jules Laforgue, Isidore Ducasse et son biographe éclairé Jean-Jacques Lefrère. Toujours dans le domaine littéraire, si Théophile Gautier brille encore d’un certain éclat, on a tendance à ignorer Laurent Tailhade. Celui-ci, comme les autres, quitta la ville assez tôt et entreprit à Paris une carrière de poète iconoclaste dont on trouve une bonne illustration dans cette anthologie. Les pièces rassemblées proviennent de deux recueils, Poèmes aristophanesques (1904) et Poèmes élégiaques (1907). Le second porte la marque de l’époque, entre Parnasse et symbolisme, montre le goût de Tailhade pour les termes rares ou nouveaux, sacrifie aux thèmes, aux mythes et aux personnages de la poésie traditionnelle, Dionysos, Aphrodite, Ophélie “Et Narcisse au grand cœur qui mourut de s’aimer”. Le premier est plus intéressant car il révèle le Tailhade féroce, batailleur, pourfendeur des valeurs et des gloires de l’époque : les soutanes, les culottes de peau et les parlementaires en prennent pour leur grade, notamment Barrès et Drumont. Le bourgeois est l’ennemi, grossier, grotesque, ridicule, dans des poèmes qui rappellent les “Monsieur Prudhomme” et “À la musique” de ses illustres devanciers. Donnons comme exemple le savoureux “Hydrothérapie” :

Le vieux monsieur, pour prendre une douche ascendante,

A couronné son chef d’un casque d’hidalgo

Qui, malgré sa bedaine ample et son lumbago,

Lui donne un certain air de famille avec Dante.

Ainsi ses membres gourds et sa vertèbre à point

Traversent l’appareil des tuyaux et des lances,

Tandis que des masseurs, tout gonflés d’insolences,

Frottent au gant de crin son dos où l’acné point.

Oh ! l’eau froide ! oh ! la bonne et rare panacée

Qui, seule, raffermit la charpente lassée

Et le protoplasma des sénateurs pesants !

Voici que, dans la rue, au sortir de sa douche,

Le vieux monsieur qu’on sait un magistrat farouche

Tient des propos grivois aux filles de douze ans.

JEUDI.         

Contrepèterie de trottoir.

VENDREDI.

Lecture.

Les Cigares du pharaon (Hergé, Casterman, 1934, 62 p., 11,95 €).

Vie culturelle.

Nous sommes ce soir au vernissage de l’exposition “Cosmos”, à Épinal, qui rassemble sur ce thème des œuvres provenant des Fonds Régionaux d’Art Contemporain du Grand Est. On ne dira rien de la valeur artistiques des œuvres présentées : celle-ci passe pour nous au second plan, derrière la manière dont elles ont été accrochées ou installées. C’est que l’ensemble a été monté, au cours des deux dernières semaines, par la régisseuse des collections et projets hors les murs du FRAC Lorraine, que nous connaissons un peu.                 

Le cabinet de curiosités du notulographe.

Histoires d’eau, photos de Jean-François Fournié.

Châteauvillain (Haute-Marne), 1er mai 2019

Torgny (Belgique), 9 mars 2019

SAMEDI.

Football.

SA Spinalien – Wasquehal 3 – 1.

Lecture.

Tout ce qui est à toi brûlera (The Last Thing To Burn, Will Dean, Hodder & Stoughton, 2020 pour l’édition originale, Belfond, coll. “Noir”, 2022 pour la traduction française, traduit de l’anglais par Laurent Bury; 272 p., 20 €).

Will Dean est un auteur anglais qui, apparemment, sait d’où vient le vent. En pleine vague du polar scandinave, il sort une trilogie basée sur les enquêtes d’une journaliste suédoise, aujourd’hui que les histoires de femmes sous emprise se multiplient, il s’y colle immédiatement avec ce dernier titre. Mais on est loin de La Deuxième Femme de Louise Mey, un modèle dans le genre. C’est ici une histoire en gros sabots, interminable, dont chaque phrase pèse des tonnes. 

Films vus.

  • Le Coup de l’escalier (Odds Against Tomorrow, Robert Wise, É.-U., 1959)                              
  • Canicule (The Dry, Robert Connolly, Australie – É.-U – R.-U., 2020)                              
  • Dis-moi oui… (Alexandre Arcady, France, 1995)                              
  • Mignonnes (Maïmouna Doucouré, France, 2020).             

L’Invent’Hair perd ses poils.

Lons-le-Saunier (Jura), photo de Francis Pierre, 25 juillet 2012

Abbeville (Somme), photo de Jean-Damien Poncet, 21 juin 2020

Le chant du poil.

Pelléas et Mélisande (Claude Debussy), Lyon (Rhône), 1987

Bon dimanche,

Philippe DIDION