19 mars 2023 – 1006

DIMANCHE.

Lecture.

Le Matin des origines (Pierre Bergounioux, Verdier, 1992; 64 p., 9 €).

Nous voici à un tournant du parcours de Bergounioux. Avec Le Matin des origines, il se détourne de Gallimard (il y reviendra) et abandonne le roman (il y reviendra) pour se tourner vers le récit court qui, à l’exception des volumineux Carnets de notes, sera sa marque de fabrique. Désormais, il fera preuve d’un nomadisme éditorial peu commun, livrant ses textes tantôt à des grandes maisons (Nathan, L’Oliver, Fayard) ou à des structures plus modestes (Galilée, Cécile Defaut), tantôt à d’obscures boutiques au nom de coopératives bio (À une soie, Les Prairies ordinaires, L’Atelier du grand tétras), tout en privilégiant les amis de William Blake & Co., Fata Morgana et Verdier. Verdier qui, en publiant au tournant des années 2000 François Bon, Pierre Michon, Bergounioux et Mathieu Riboulet, fera preuve d’une rare cohérence éditoriale. Le Matin des origines revient sur les racines lotoises de l’auteur, sur la maison rose qui fut le titre d’un de ses premiers romans. L’abord est toujours ardu, la phrase tortueuse, et il convient d’être vigilant si l’on ne veut pas en être éjecté en cours de route. Mais il n’y a plus de déguisement, plus de masque, plus d’appareil fictionnel. Maintenant, c’est moi qui cause, c’est mon enfance, mes souvenirs, mes lieux, mes morts. C’est lui, c’est Bergou.

LUNDI.          

Vie familiale.

C’est une journée à haut potentiel festif puisque c’est celle où mes parents intègrent l’EHPAD où ils vont désormais couler leurs vieux jours. Ma mère y est déjà installée quand nous arrivons avec mon père, je ne verrai donc pas la chambre double qu’ils sont appelés à partager. Lui est ravi, l’établissement est bâti sur les hauteurs de la ville, au milieu des champs, c’est son quartier, là où il venait jouer enfant. Je laisse ma sœur et mon frère le conduire pendant que je m’occupe des formalités d’entrée. Auparavant, nous avons rassemblé ses affaires, son trousseau, embarqué des photos, des cadres, des objets familiers. Lui devant sa bibliothèque, regardant ses livres qu’il ne peut plus comprendre : “Alors je suis obligé de laisser tout ça ?” Je suis ému bien sûr, je ne verrai plus mon père à moins que son état de santé ou le veuvage ne le conduisent ailleurs. Ému, mais moins que je pouvais le redouter. Je suis avant tout soulagé, égoïstement d’abord parce que c’est pour moi la fin d’une longue période de tension épuisante, et puis aussi parce que je le sais maintenant en sécurité. Pour la première fois depuis bien longtemps, je respire.

MARDI.           

Vie familiale.

Comme je l’ai fait tous les jours ou presque ces temps-ci, je monte chez mes parents. C’est qu’il y a maintenant là-haut un tas de choses à faire, à ranger, à arranger dans la maison vide. En chemin, je m’aperçois que, pour la première fois depuis bien longtemps aussi, je fais le trajet sans la peur au ventre, la boule qui m’étreignait à l’idée de ce que j’allais trouver sur place ou de l’accueil qui allait m’être réservé. Non seulement je respire, mais je respire à pleins poumons.             

Lecture.

Tati filme (sous la direction d’Alison Castle, in “L’Intégrale Jacques Tati”, Taschen, 2019; 1136 p., 185 €).

Scénarios.

MERCREDI.                 

Éphéméride.

15 mars [1932]

Breakfast à la mission, pas mauvais. Coup d’œil sur l’arrière de la mission : ravin plein de palmiers, deux ou trois paillotes; sous la pluie qui tombe depuis ce matin, c’est (bien que nous soyons remontés un peu au nord) un coin de forêt vierge. Remerciements aux hôtes. Départ.

Autre type de villages : cases coniques à toits de paille très grands, bulbeux comme des coupoles d’églises russes. Quelques femmes ont le front bleui. Mais tout se civilise… Les enfants ne disent plus seulement bonjour; souvent, ils tendent la main. Sans doute des touristes leur ont-ils donné des sous.” (Michel Leiris, L’Afrique fantôme)

JEUDI.

Contrepèterie de trottoir.

VENDREDI.

Lecture.

M’appelle pas fillette! (The Deep, Mickey Spillane, 1961 pour l’édition originale, Le Cherche Midi, coll. “Borderline”, 2022 pour la traduction française, traduit de l’américain par Paul Marc-Ayre; 300 p., 15 €).

Curiosités.

De l’influence de la sécheresse sur le dynamisme commercial des villes de province.

Charmes (Vosges), photo de l’auteur, 1er juillet 2021

Dole (Jura), photo de Jean-François Fournié, 5 février 2022

SAMEDI.             

Films vus.

  • La Syndicaliste (Jean-Paul Salomé, France – Allemagne, 2022)                              
  • L’Habit vert (Roger Richebé, France, 1937)                              
  • Coupez (Michel Hazanavicius, France – É.-U. – R.U. – Japon, 2022)                              
  • Bullitt (Peter Yates, É.-U., 1968)                              
  • Les Tuche 4 (Olivier Baroux, France, 2021).                                          

L’Invent’Hair perd ses poils.

Badonviller (Meurthe-et-Moselle), photo de Francis Henné, 27 juillet 2012

Mers-les-Bains (Somme), photo de Gérard Viry, 27 décembre 2020

IPAD. (Itinéraire Patriotique Alphabétique Départemental).

1er mai 2022. 87 km. (42 028 km).

581 habitants

Une stèle de granit gris s’élève au pied de la Mairie. Pas de décoration, sinon une plaque ornée d’un cor de chasse et d’une palme. Les noms sont répartis sur quatre colonnes.

À nos morts

1914-1918

Colonne 1 : 1939-1945 : HOCQUAUX Camille, LASSAUCE Fernand, MARTIN Marie

Colonne 2 : 19 noms d’APTEL Albert à LAMBERT Émile

Colonne 3 : 19 noms de LECOMTE Georges à FALCH Émile

Colonne 4 : 5 noms de BOUILLET Pierre à PIERRE René Marcel.

Le monument est signé Marcadella – Thiéfosse.             

Poil et pellicule.

Robert et Robert (Claude Lelouch, France, 1978)

Bon dimanche,

Philippe DIDION

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