N.B. Le prochain numéro des notules sera servi le dimanche 16 juillet 2017.
MERCREDI.
Éphéméride. “Jeudi [28 juin 1894]
Je n’ai rien écrit par lassitude.
Pas de nouvelles d’E. A-t-elle reçue [sic] cette lettre ?
Si oui, elle n’y aura pas cru – elle aura eu terriblement tort.
Je crois qu’elle m’aime – mais pas comme il faudrait.
L’Idée de la mort nécessaire s’affirme triomphalement – il faut – dans quelques mois, elle sera mienne ou j’aurai vécu.
À moins que je ne découvre une raison de vivre : ce qui est bien invraisemblable.
Je n’ai pas encore de revolver, d’ailleurs.
JH. eût pu seul me sauver : qu’il soit obéi à la Fatalité, et puis c’est plus simple.
Avant de me tuer, j’achèverai un volume pour poser encore un peu. Les Flirts m’ont donné le peu de bonheur que j’ai eu, il faut au moins que je le dise.” (Jean de Tinan, Journal intime 1894-1895)
JEUDI.
Lecture. La Séquence des corps (The Body Farm, Patricia Cornwell, Penguin Books, 1994 pour l’édition originale, traduit de l’américain par Dominique Dupont-Viau; in « Patricia Cornwell 2, Quatre romans », éditions du Masque, coll. Intégrales, 2001; 1240 p., s.p.m.).
Jusque là, les intrigues de Patricia Cornwell avaient paru assez charpentées pour faire oublier les stéréotypes de son écriture et de ses personnages. La profession de médecin légiste exercée par Kay Scarpetta, héroïne récurrente, donnait lieu à quelques scènes marquantes et coloraient le tout d’une tonalité scientifique novatrice et surprenante. Il y avait aussi les éléments technologiques, l’essor de l’informatique, la constitution de diverses bases de données au sein du F.B.I., l’employeur de Scarpetta. La Séquence des corps ne diffère guère des quatre romans précédents sur ces plans-là mais la recette ne fonctionne plus. Baisse de qualité, perte d’indulgence du lecteur, lassitude, les raisons sont diverses. Toujours est-il qu’il faut se rendre à l’évidence : malgré les efforts de sa créatrice, le personnage de Kay Scarpetta n’attire aucune empathie, aucune adhésion du lecteur. Ses démêlés avec sa nièce ou avec ses collègues, censés l’humaniser, se répètent de livre en livre et ont fini par ne susciter que de l’indifférence. L’écriture, une usine à clichés, est de plus desservie ici par une traduction paresseuse et fautive dans l’emploi des temps verbaux. L’innovation technologique a fait son temps, et force est de constater une fois de plus que la loupe de Sherlock Holmes a moins vieilli que les disquettes des ordinateurs du F.B.I. Quel ennui !
VENDREDI.
Le cabinet de curiosités du notulographe. Aperçu d’une collection de cocottes, photos de l’auteur.
Garde-manger familial, 14 février & 10 juin 2016 / Gérardmer (Vosges), 15 avril 2016
SAMEDI.
Vie de chantier. La cabane est en travaux. Une salle de bains à refaire. Depuis lundi défilent les corps de métier, carreleur, électricien, plaquiste, plombier, peintre, que sais-je, je ne les ai pas tous vus. Rapidement, ce qui devait être un ballet harmonieux a tourné à la danse des canards : aléas, imprévus, impondérables, blessures (six points de suture pour le plombier au bout de dix minutes d’exercice), absence de l’un, retard de l’autre ont eu raison du bel ordonnancement prévu. En fait, rien ne se passe comme attendu. Aujourd’hui, le plaquiste en chef est venu casser ce que son employé – admirateur du Merzbau selon toute évidence – avait fait hier. La dame qui a la charge de superviser le foutoir s’arrache les cheveux. C’est à nous de la rassurer : jamais dans ce logis où dans ceux que nous avons précédemment occupés l’intervention d’un homme de l’art ne s’est conclue autrement que par une catastrophe domestique, ce qui a fini par nous rendre fatalistes. J’en suis venu à penser que la plupart des gens qui s’adonnent aux travaux d’intérieur ne le font pas pour le plaisir qu’ils disent y trouver ou pour les économies qu’ils disent réaliser mais pour échapper à l’incurie des artisans professionnels.
Films vus pendant la semaine. L’Enfer des anges (Christian-Jaque, France, 1941)
Cop Car (Jon Watts, É-U., 2015)
Paris brûle-t-il ? (René Clément, France – É-U., 1966)
Elle (Paul Verhoeven, É-U., 2016)
L’École des facteurs (Jacques Tati, France, 1947)
Nos souvenirs (The Sea of Trees, Gus Van Sant, É-U, 2015)
Noblesse oblige (Kind Hearts and Coronets, R.-U., 1949).
L’Invent’Hair perd ses poils.
Talant (Côte-d’Or), photo de l’auteur, 4 novembre 2010 / Sansac-de-Marmiesse (Cantal), photo de Marc-Gabriel Malfant, 1er mars 2013
Poil et plume. “Plus le coiffeur fera attendre plus il aura de travail.” (Olivier Hervy, Formulaire)
Bon dimanche,
Philippe DIDION