29 janvier 2017 – 737

DIMANCHE.

Vie politico-poétique. Il reste ce soir deux candidats à la primaire de la Belle Alliance Populaire : l’un est Valls, l’autre est Hamon.

MARDI.

En feuilletant Livres Hebdo. Olivier Goudeau, 50 ans de tennis de table en Deux-Sèvres : 1966-2016, Geste, 2016. Alléchant.

MERCREDI.

Lecture. Chanson douce (Leïla Slimani, Gallimard, 2016; 240 p., 18 €).

Revenons à Nabokov et à La vraie vie de Sebastian Knight. Au chapitre XVI, le narrateur est en discussion avec une femme. Citation :

“- Eh bien son mari, quoi ! La plupart des maris sont des imbéciles, mais celui-là était hors concours. Ça n’a pas duré longtemps heureusement. Prenez une des miennes.”   Elle me tendit aussi son briquet. le bouledogue gronda dans son sommeil. Elle changea de position etc.”

                                  Dans ces deux lignes se niche une facette de l’art de Nabokov, l’art du raccourci. Un auteur quelconque se serait senti tenu de préciser, de meubler : “Je pris mon paquet de cigarettes. Elle sortit le sien, me le présenta en disant “Prenez une des miennes”. Elle me tendit aussi son briquet, etc.” La manie de tout dire, de ne rien laisser dans l’ombre, de ne rien abandonner à l’initiative du lecteur. Nabokov, lui, fait confiance à son lecteur : celui-ci saura recoller les morceaux, entendre ce qui n’est pas dit. Leïla Slimani fait partie des auteurs qui disent tout. Son roman est loin d’être mauvais, il tient, comme ces films réalisés par des tâcherons sans style ou comme ces polars de série, par le scénario, l’idée de départ (une nounou qui tue les enfants dont elle a la garde) et rien d’autre. On se laisse faire, on suit facilement parce que tout est dit, les gestes, les pensées, les mouvements. Ce n’est pas inintéressant mais c’est un peu fade, ça ne laisse pas de trace, ça ne mord pas. Pour cela, il faudrait une écriture, quelque chose qui présente un peu d’aspérités, qui fasse, on y revient, participer le lecteur. On ne nous fera pas dire que Chanson douce ne méritait pas le Prix Goncourt, le Goncourt n’a pas vocation à couronner une écriture, mais l’eau qui coule de ce robinet est bien tiède.

                                 Histoires littéraires n° 56 (Du Lérot éditeur, octobre-novembre-décembre 2013; 320 p., 25 €).

Paul-Jean Toulet inédit.

L’honnête homme connaît le vers “Dans Arle, où sont les Aliscams”. Le très honnête homme sait qu’il est de Paul-Jean Toulet. L’homme plus qu’honnête sera capable de vous citer un titre de Toulet, Contrerimes, et un autre vers issu de sa plume : “Prends garde à la douceur des choses”. J’en était à peu près là, drapé dans mon honnêteté sans tache, avant d’entreprendre la lecture de ce numéro. Dont on ressort ébahi par la complexité de ce bonhomme et incollable sur son amitié avec Curnonsky, ses rapports avec l’opium, son goût pour les cartes postales, ses difficultés à faire bouillir la marmite et mille autres choses qui le rendent particulièrement attachant.

                   Épinal – Châtel-Nomexy (et retour). Don Miguel Ruiz, Les quatre accords toltèques : la voie de la liberté personnelle, Jouvence, 2016.

Éphéméride. “25 janvier [1941].

Ils sont  habiles dans leur propagande. Depuis un mois, on crevait littéralement de faim. Les boucheries étaient vides. On mangeait pour uniques légumes des rutabagas. Tout le monde souffrait.

Les journaux annonçaient que cette disette avait pour cause le “marché noir”, c’est-à-dire clandestin, ce qui n’est pas vrai. Si le marché noir existe, son activité porte sur quelques tonnes de marchandises. Les feuilles disaient aussi qu’il fallait s’en prendre à Vichy qui se préoccupait peu de la zone libre. Ce n’était pas vrai non plus. Les Allemands faisaient aux abattoirs des réquisitions massives et prélevaient en général sur toutes les denrées.

Depuis que Laval est rentré en grâce : on collabore. Les boucheries regorgent. On ne fait plus queue. On peut choisir du bœuf, du veau ou du mouton. Ainsi, il apparaît que seule la mauvaise volonté qu’on peut mettre à collaborer est responsable de tout.

Ce matin, ma servante me racontait qu’une femme disait dans une boucherie :

– Tout de même, il vaut mieux se collaborer…” (Maurice Garçon, Journal 1939-1945)

JEUDI.

Épinal – Châtel-Nomexy (et retour). Patricia MacDonald, Personne ne le croira, Le Livre de poche, 2016.

VENDREDI.

Le cabinet de curiosités du notulographe. Enseigne à Aubusson (Creuse), photo de l’auteur, 5 août 2016.

SAMEDI.

Films vus. 

Mon beau-père, mes parents et moi (Meet the Fockers, Jay Roach, E.-U., 2004)

Joséphine s’arrondit (Marilou Berry, France, 2016)

                                Le grand méchant loup (Nicolas Charlet & Bruno Lavaine, France, 2013)

Le nouveau stagiaire (The Intern, Nancy Myers, E.-U., 2015)

  Le Pacte des loups (Christophe Gans, France, 2001)

Joy (David O. Russell, E.-U., 2015)

Seuls sont les indomptés (Lonely Are the Brave, David Miller, E.-U., 1962).

L’Invent’Hair perd ses poils. Hommage à Penelope Fillon.

Moyen (Meurthe-et-Moselle), photo de Francis Henné, 27 août 2010

              Poil et plume. La lumière poussiéreuse donne au Salon de coiffure une allure tarabiscotée, encore que ce ne soit pas un vrai Salon de coiffure — c’est tout simplement la première pièce du rez-de-chaussée aménagée tant bien que mal. Le matériel est pauvre : deux paires de ciseaux (l’un à bout pointu, l’autre à lames crantées), un blaireau au poil ras, des rasoirs émoussés, des savons, quelques peignes, une brosse, et un gigantesque bavoir en vichy bleu pour les clients. Il lave rarement le bavoir, se contentant de le secouer dès que la coupe est finie; le bavoir a été si peu lavé, que chaque carré du vichy possède son poil. Tête-Dure est un peu dégoûté. Sur sa nuque, il sent le fin cordon gras dont le nœud est raide de graisse et de crème capillaire.” (Francesco Pittau, Tête-Dure)

Bon dimanche,

Philippe DIDION

                                                         

22 janvier 2017 – 736

LUNDI.

Vie littéraire. Je reçois, après l’avoir rédigé, le dernier Bulletin de l’Association Georges Perec.

Lecture. Les Confidences d’Arsène Lupin (Maurice Leblanc, Lafitte, 1913, rééd. in « Les Aventures extraordinaires d’Arsène Lupin » vol. 1, Omnibus 2004, 1216 p., 23 €).

Nouvelles.

                        Anabase (Saint-John Perse, Gallimard, 1924, rééd. in “Œuvres complètes”, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade n° 240, 1972; 1428 p., 56 €).

MARDI.

Lecture. Contes de l’âge du jazz (Tales of the Jazz Age, F. Scott Fitzgerald, Charles Scribner’s Sons, New York, 1922, traduit de l’américain par Véronique Béghain in “Romans, nouvelles et récits I”, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade n° 581, 2012; 1570 p., 70 €).

Nouvelles.

Où l’on retrouve, après avoir vu le film de David Fincher, “L’étrange histoire de Benjamin Button”, une merveille.

MERCREDI.

Éphéméride. “Dimanche 11 [janvier 1948].

Lever tardif. It’s good. Ne sommes-nous pas rentiers ?

La mère et le père partent à Pompadour. On mange seuls et on prend le 14 h 04. Cous a un abcès je ne sais où, en bon malade professionnel qu’il est. A Triage, Jimmy. Jacky a raté le train. L’attendrons en gare de Lyon. Prenons le bus au complet pour Richelieu-Drouot. Cinés archi-bourrés.

Écoutant les amuse-gueule d’un camelot, tombons sur qui, ô surprise, Marcel et Nicole. Échouons au Concert Pacra. Music-hall de bonne veine et divertissant. Music-hall, mieux que la radio, que le théâtre et que le cirque, j’aimerais écrire pour toi.

Rude mal de crâne. Atroce. Je trouve le moyen d’aller voir un navet, Dernier refuge, au Palace.

Jimmy a de rudes talents théâtraux. Quand il me les aura prouvés, le présenterai peut-être à Pierre ou à ce charmant Perier qui, d’après la dame, voudrait me connaître.” (René Fallet, Carnets de jeunesse)

Presse. Nous parlions, voici peu, de Benjamin Button. Le quotidien local nous offre un écho illustré de son étrange histoire.

Vosges Matin, 11 janvier 2017

VENDREDI.

Le cabinet de curiosités du notulographe. Enseigne indolore à Québec (Québec, Canada), photo d’Éric Dejaeger, 13 janvier 2015.

                  Films vus. 99 Homes (Ramin Bahrani, E.-U., 2014)

L’Envers du paradis (Edmond T. Gréville, France, 1953)

Les Chevaliers blancs (Joachim Lafosse, Belgique – France, 2015)

Tout va bien (Jean-Luc Godard et Jean-Pierre Gorin, France – Italie, 1972)

Le Père Noël (Alexandre Coffre, France – Belgique, 2014)

                                   Le Pont des espions (Bridge of Spies, Steven Spielberg, E.-U. – Allemagne – Inde, 2015).

SAMEDI.

             L’Invent’Hair perd ses pèls.

  

Figueras/Figueres (Catalogne), photo de Marc-Gabriel Malfant, 1er septembre 2010 / Barcelone (Catalogne), photo du même, 24 décembre 2012

IPAD (Itinéraire Patriotique Alphabétique Départemental). 8 février 2015. 126 km. (28201 km).

643 habitants

   Le monument, plutôt imposant, est une colonne de granit rose sans ornement, dressée devant la cour de l’école. Quatre boules de buis sont plantées aux coins du parterre qui l’encadre.

1914-1918

Aux enfants de Moussey

Morts pour la France

   Gauche : 44 noms sur 2 colonnes, d’ANDRÉ Eugène à ODILLE J Bte.

Droite : 19 noms de PETIT Georges à VINCENT Eugène sur une colonne, 13 Victimes civiles sur une autre.

Dos :

La commune de Moussey

a été envahie

par les Allemands

du 25 août 1914

au 11 novembre 1918

Ce monument a été inauguré

le 10 juillet 1927

par Monsieur le Maréchal Lyautey

              Poil et BD.

Tanxxx, Des croûtes au coin des yeux

              Vie parisienne. Je pars pour Paris par le 9 heures 29. A Nancy monte un trio de théâtreux, gens importants à leurs propres yeux, dont la conversation inepte emplit tout le wagon. Ceux-là, j’espère qu’on va leur couper dare-dare leurs subventions. Sur place, j’assiste à l’Assemblée Générale de l’Association Georges Perec qui ne va pas chômer cette année, entre parution Pléiade, séminaire, journée thématique, hommages et autres réjouissances. Par intervalles, je parviens à rester en contact avec la famille, où la situation sanitaire est alarmante, ce qui n’est pas aisé sans téléphone de poche et avec un appareil d’hôtel défaillant.

DIMANCHE.

  Lecture. La vraie vie de Sebastian Knight (The Real Life of Sebastian Knight, Vladimir Nabokov, New Directions, New York, 1941 pour l’édition originale, Albin Michel, 1951 pour la traduction française, traduit de l’anglais par Yvonne Davet, rééd. in “Œuvres romanesques complètes » II, Gallimard 2010, Bibliothèque de la Pléiade n° 561, révision de la traduction par Yvonne Couturier; 1764 p., 75 €).

V. entreprend d’écrire la biographie de son frère Sebastian Knight, un célèbre écrivain récemment disparu. Pour ce faire, il visite les lieux qu’il a traversés, rencontre des personnes qui l’ont connu. Thomas H. Cook a bâti avec succès la plupart de ses romans policiers sur ce principe de reconstitution biographique, avec peut-être cette vraie vie de Sebastian Knight comme modèle. Les polars de Thomas Cook sont au minimum intéressants, captivants pour les meilleurs, le roman de Nabokov est époustouflant et les rejette dans l’ombre. Premier roman de son auteur écrit directement en anglais, il montre d’emblée une langue somptueuse parfaitement rendue dans la traduction d’Yvonne Davet. Celle-ci n’est pas inconnue des milieux littéraires puisque c’est elle qui quitta mari et enfant pour partir à la poursuite d’André Gide dont elle était tombée éperdument amoureuse et qui gâcha sa vie dans cette quête infructueuse. Autre chose à noter : Georges Perec a glissé quatre citations de La vraie vie de Sebastian Knight dans La Vie mode d’emploi. J’en ai retrouvé trois, j’ai la moyenne.

MERCREDI.

  Éphéméride. À sa mère.

Athènes, 18 janvier 1851

“[…] Nous avons fait une tournée de dix jours aux Thermopyles et à Delphes, couchant dans des gîtes affreux et ne mangeant guère que du pain sec, grâce à la canaillerie de notre drogman. Celui-là paye pour les autres. – Je l’ai si bien secoué qu’il a avoué à notre hôte qu’il ne pouvait plus me regarder sans terreur. je crois en effet que je n’ai pas l’air doucereux en de certains moments. Du reste nous avons vu de belles et de magnifiques choses, nous avons engueulé le Parnasse et invoqué Apollon, aux Thermopyles j’ai perdu un éperon et fait débusquer un lièvre de dessous un buisson. J’ai vu l’antre de Trophonius que visita ce brave Apollonius de Thyane. – Nous étions couverts de peaux de bique et comme elles se déchiraient dans la journée, nous les raccommodions nous-mêmes le soir. Je faisais la grisette et Maxime, simulant le tourlourou, me faisait la cour, c’était bien gentil. Il me complimentait sur mes petites menottes et moi je le repoussais en lui disant que je n’aimais pas l’odeur du tabac. Nous devenons tellement bêtes que d’ici à peu nous allons jouer sans doute au gendarme et au voleur.

Pour le Péloponnèse, nous avons pris un autre drogman, qui nous est très recommandé; celui que nous avions pour les Thermopyles avait été pris trop à la hâte. Mais où est Stéphany et même ce brave gueux de Joseph ?

Adieu, pauvre chérie. Porte-toi bien, soigne-toi bien, arrive-moi dodue et grasse. le soleil de la Phocide m’a reculotté un peu, et mes cheveux ont l’air de vouloir repousser.

Mille baisers sur la bonne mine.

A toi, ton fils.” (Gustave Flaubert, Correspondance)

JEUDI.

Lecture. Ténèbres, ténèbres (Darkness, Darkness, John Harvey, 2014 pour l’édition originale, Payot & Rivages, coll. Thriller, 2015 pour la traduction française, traduit de l’anglais par Karine Lalechère; 336 p., 22 €).

Après un retour raté en 2010 avec Cold in Hand, Charles Resnick, inspecteur de la police de Nottingham auquel John Harvey aura consacré une douzaine de volumes, fait ici ses adieux. Mis à la retraite, il donne un coup de main ponctuel dans une enquête suivant la découverte d’un corps, celui d’une femme disparue trente ans auparavant, au moment des grandes grèves de mineurs du Nottinghamshire. John Harvey, en retraçant parallèlement à l’enquête ces événements de 1984-85, retrouve sa fibre sociale et livre une histoire convaincante et prenante. Il peut désormais, comme il le dit dans sa postface, laisser son héros passer en paix ses vieux jours, laissant au lecteur l’image d’un homme attachant dans ses nombreux combats pour la justice et la dignité humaine.

VENDREDI.

Lecture. Exil (Saint-John Perse, Gallimard, 1942, rééd. in “Œuvres complètes”, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade n° 240, 1972; 1428 p., 56 €).

Le cabinet de curiosités du notulographe. Aperçu d’une collection d’enseignes “Au Bon Marché”, photos de l’auteur.

    

Charmes (Vosges), 29 juin 2015 / La Celle-Dunoise (Creuse), 31 juillet 2015

SAMEDI.

Films vus. Des Apaches (Nassim Amaouche, France, 2015)

Les Vikings (The Vikings, Richard Fleischer, E.-U., 1958)

Au cœur de l’océan (In the Heart of the Sea, Ron Howard, E.-U. – Australie – Espagne, 2015)

Tonnerre (Guillaume Brac, France, 2013)

Le grand partage (Alexandra Leclère, France, 2015)

Fog (The Fog, John Carpenter, E.-U., 1980)

Les Anarchistes (Élie Wajeman, France, 2015).

L’Invent’Hair perd ses poils. Capilliculture élémentaire.

  

Paris (Seine), rue de Crussol, photo de Pierre Cohen-Hadria, 4 septembre 2010 / Montluçon (Allier), photo de l’auteur, 27 juillet 2013

Poil et art.

Martial-Potémont, Les Boulevards de Paris

Bon dimanche,

Philippe DIDION

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

8 janvier 2017 – 735

N.B. Le prochain numéro des notules sera servi le dimanche 22 janvier 2016.

DIMANCHE.

Bilan annuel 2016.

* 142 livres lus (+ 18 par rapport à 2015)

* 304 films vus (+ 51)

* 403 abonnés aux notules version électronique, sans oublier les irréductibles abonnés papier de l’Aveyron (=)

Chantiers littéraires :

* 6618 Souvenirs quotidiens notés (+ 366, le compte est bon)

* 486 volumes étudiés dans L’Atlas de la Série Noire (+ 12)

* 370 communes visitées (+ 18) d’Ableuvenettes (Les) à Punerot dans le cadre de L’Itinéraire Patriotique Alphabétique Départemental

* 277 photos de Bars clos (+ 13)

* 1299 tableaux commentés dans la Mémoire louvrière (+ 39)

                                                * 596 publicités murales et enseignes peintes photographiées (+ 40)

* 3243 photographies de salons de coiffure pour l’Invent’Hair (+ 465)

                                                * 193 frontons d’école photographiés pour un Aperçu d’épigraphie républicaine (+ 9)

* 104 Lieux où j’ai dormi retrouvés ou ajoutés et photographiés (+ 8)

                                                Parutions :

* Bulletin de l’Association Georges Perec n° 68, juin 2016

* Bulletin de l’Association Georges Perec n° 69, décembre 2016

* “L’art (funéraire) d’accommoder les restes (humains)”, Les Refusés n° 18, septembre 2016

* Correspondance in Quinzinzinzili : l’univers messacquien, n° 30, été 2016

* Correspondance in Viridis Candela 9e série, n° 6 : Le Publicateur du Collège de ‘Pataphysique, 15 décembre 2015

* Le Périphériscope : http://www.peripheriscope.ch/peripheriscope/notules.html

Mentions :

* http://oreilletendue.com/2011/12/07/onzieme-article-d’un-dictionnaire-personnel-de-rhetorique/

* http://www.feuillesderoute.net/notesecriture.htm (29 août 2016)

* http://oreilletendue.com/2016/12/27/crampe-et-beaute/

Précision concernant la politique photographique des notules :

* Les notuliens contribuent de façon efficace à l’avancée des chantiers photographiques qui meublent nos livraisons dominicales : le cabinet de curiosités et l’Invent’Hair leur doivent beaucoup, sans parler des aptonymes ou de la rubrique Poil et plume. Merci. Une précision s’impose toutefois : ne sont acceptés que les clichés dûment localisés, pris “en vrai”, à l’aide d’un appareil idoine ou d’un téléphone de poche. Les photos issues de sites Internet ou de réseaux plus ou moins sociaux ne sont pas homologuées.

Appel :

* Le début de l’année est généralement propice aux bonnes résolutions. Si parmi ces résolutions figure celle de ne plus vous laisser importuner par des messages électroniques antédiluviens, pesants, inutiles, creux, mal écrits, pompeux, j’en passe, et si vous vous apercevez tout à coup que les notules correspondent à l’une des catégories précitées, inutile d’engorger les tuyaux pour rien : un simple mot « stop » en réponse à ce numéro mettra fin à votre abonnement.

MERCREDI.

Éphéméride. “On souffre à table. Question, dès ce quatrième jour du nouvel an : Dieu veut-il nos peaux ?

René Martineau chargé par moi, en octobre, d’informer Joergensen de mes sentiments au sujet de son incroyable article du Vort Land, me transmet enfin la réponse. Il ne voulait pas empêcher le public danois de lire son article en me nommant. Ainsi se trouvent confirmés les pires soupçons. Johannes Joergensen que je croyais un homme du plus admirable caractère (Voir Mon Journal, p. 156 et suiv.), est simplement un journaliste. Il explique mes plaintes par une extrême “vanité de littérature” et un “désir furieux de notoriété”. La notoriété à Copenhague ! Le pauvre poète a tellement roulé dans l’escalier qu’il en est à ne pas comprendre qu’ayant essayé de lui élever le coeur, je suis désolé de le voir si bas.” (Léon Bloy, Quatre ans de captivité…, 4 janvier 1903)

Lecture. Les Dieux du verdict (The Gods of Guilt, Michael Connelly, Hieronymus Inc., 2013 pour l’édition originale, Calmann-Lévy, 2015 pour la traduction française, traduit de l’américain par Robert Pépin, rééd. LGF, coll. Le Livre de poche policier n° 34307, 2016; 454 p., 8,60 €).

Après Dans la ville en feu avec Harry Bosch, c’est au tour de Mickey Haller d’entrer en scène. En faisant alterner ainsi depuis des années ses deux héros, le flic et l’avocat, Michael Connelly présente les deux aspects d’une affaire criminelle, l’enquête et le procès. Les histoires avec Mickey Haller se terminent toujours par un morceau de bravoure judiciaire particulièrement prenant et c’est une fois de plus le cas ici. L’affaire sur laquelle l’avocat travaille est assez embrouillée mais les difficultés s’estompent une fois que le lecteur est conduit dans le prétoire pour suivre le procès. On a beau savoir que Connelly mène sa carrière littéraire comme une entreprise qui vend du Bosch et du Haller, il n’en reste pas moins diablement efficace.

JEUDI.

Lecture. La Gloire des rois (Saint-John Perse, 1911, rééd. in “Œuvres complètes”, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade n° 240, 1972; 1428 p., 56 €).

Épinal – Châtel-Nomexy (et retour). Tatiana de Rosnay, Manderley for ever au Livre de poche, 2016 à l’aller et Renee Knight, Révélée au Fleuve Noir, 2015 au retour.

VENDREDI.

Épinal – Châtel-Nomexy (et retour). Olivier Py, Les Parisiens, Actes Sud, 2016.

Lecture. Les Refusés n° 16 (septembre 2014, 224 p., 10 €).

Dossier “Le faux”.

Contient mon article sur “Les faux de Sionne”.

Les Dupes (Jean Dutourd, Gallimard, 1959; 166 p., 500 fr.).

François Caradec signale ce livre dans son Encyclopédie des farces et attrapes. À côté de deux textes sans grand intérêt, Jean Dutourd y reprend en effet une étude sur Ludwig Schnorr qu’il avait fait paraître un an plus tôt dans la NRf. Ludwig Schnorr y était présenté comme un socialiste allemand, une sorte d’équivalent obscur de Karl Marx, présent à Paris lors des événements de 1848 et 1871, et auteur de lettres à Bakounine récemment découvertes à l’occasion d’une vente. Quelques lignes suffisent pour comprendre que Schnorr n’a jamais existé que dans l’imagination de l’auteur qui raconte avec une verve réjouissante les errements idéologiques et les déboires sentimentaux de son personnage. Ce qu’il y a de bien avec les blagues, c’est que parfois elles marchent. Et si le critique Henri Guillemin, cité dans le texte, ne se fit pas abuser et s‘en amusa, ce ne fut pas le cas d’André Breton. Lequel Breton, lorsqu’il s’aperçut de sa méprise, publia un texte acerbe dans la revue Bief pour dire tout le mal qu’il pensait de Dutourd en particulier et des mystifications littéraires en général. A la fin du livre, Dutourd ne résiste pas au plaisir de reproduire, assorti de quelques commentaires piquants, l’article de Breton, “auteur de quelques bons ouvrages mais qui décourage l’admiration depuis trente ans par ses pitreries solennelles.” L’auteur signale en outre qu’il eut “quelque temps le désir d’envoyer ce texte […] à M. Nadeau, directeur de la revue Les Lettres nouvelles, dont la crédulité est proverbiale.” Allusion à une mystification plus célèbre, celle de La Chasse spirituelle, ce faux Rimbaud gobé par Nadeau et bien d’autres… à l’exception d’André Breton, plus perspicace en cette occasion.

Le cabinet de curiosités du notulographe. Politique tarifaire audacieuse chez Yves Rocher, courrier du 25 juin 2015 reçu par Caroline Didion.

SAMEDI.

Films vus. Astérix et la surprise de César (Gaëtan et Paul Brizzi, France, 1985)

Life (Anton Corbijn, R.-U. – E.-U. – Allemagne – Canada – Australie, 2015)

Charlot apprenti (Work, Charles Chaplin, E.-U., 1915)

Charlot fait la noce (A Night Out, Charles Chaplin, E-U., 1915)

Encore heureux (Benoît Graffin, France, 2015)

Killer Joe (William Friedkin, E.-U., 2011)

La Vie devant soi (Moshé Mizrahi, France, 1977)

Nos futurs (Rémi Bezançon, France, 2015)

L’Immortel (Richard Berry, France, 2010).

  L’Invent’Hair perd ses poils. Cardiologie capillaire.

 

Épinal (Vosges), photo de l’auteur, 30 août 2010 / Laval (Mayenne), photo de Martine Sonnet, 9 juin 2012

Poil et plume. “En leur temps, les morts tragiques et prématurées de Camus et de Nimier l’avaient touché; mais il participa à leurs obsèques plus en auteur Gallimard qu’en admirateur. Toutefois, dans le sillage académique où il se mouvait, il n’avait pu que suivre celles d’immortels pour qui son admiration était aussi mitigée : Maurois, Cocteau, – autre auteur Gallimard –, et Genevoix. Si l’on avait souri de voir, sur le cercueil du second, dans l’église de Milly-la-Forêt, une couronne portant le nom d’un grand coiffeur, cela rappelait à André le libellé d’une carte de visite que lui avait montré un collectionneur : “Chef de la délégation des coiffeurs aux obsèques de Victor Hugo.” La coiffure a toujours honoré la poésie, malgré le mot de Voltaire à un perruquier poète : “Faites des perruques !” Jasmin fut le perruquier-poète du XIXe siècle.” (Roger Peyrefitte, L’illustre écrivain)

Bon dimanche,

Philippe DIDION

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1er janvier 2017 – 734

LUNDI.                 
            Lecture. Le Publicateur du Collège de ‘Pataphysique. Viridis Candela, 9e série, n° 6 (15 décembre 2015, 96 p., 15 €).

“Ethnographie imaginaire” 

MERCREDI.

Éphéméride. 28 décembre [1954]

Leger et les Shafroth sont venus prendre le thé. Leur bru étant française, la conversation s’est transformée en une conférence politique de la part d’Alexis. Ils étaient tous fascinés.” (Katherine Biddle, Journal 1940-1970)
JEUDI.
          Obituaire. Marcel Gotlib, Zsa Zsa Gabor, Léo Marjane, Michèle Morgan, David Hamilton, George Michael, Claude Gensac, Carrie Fisher et, aux nouvelles radiophoniques de ce matin, Michel Déon, Pierre Barouh et Debbie Reynolds : ça déboise sec en ce moment, on passe son temps à lire des nécrologies. Incomplètes, bien sûr. Prenons le cas de Michèle Morgan. On a oublié de rappeler qu’en 1954, “l’année des soucoupes volantes” comme le rappelait la revue Schnock en septembre 2015, l’actrice avait défrayé la chronique en déclarant avoir aperçu “un disque stationnaire au-dessus du dôme des Invalides, là où Napoléon est enterré”. Non seulement elle avait de beaux yeux mais elle avait de bons yeux. Quant à Michel Déon, personne n’a encore mentionné le petit mot que Valéry Giscard d’Estaing lui fit passer lors d’une séance à l’Académie française au cours de laquelle il avait réclamé la modification d’un article du dictionnaire : “Pas d’accord, Déon.”
VENDREDI.
                  Lecture. Le Don (Dar, Vladimir Nabokov, Chekhov Publishing House, New York, 1952 pour l’édition en russe, Putnam’s Sons, 1963 pour la traduction anglaise, Gallimard, 1967 pour la traduction française, rééd. in “Œuvres romanesques complètes » II, Gallimard 2010, Bibliothèque de la Pléiade n° 561; 1764 p., 75 €). 
                                385 pages de texte, 115 pages de notes. Au fur et à mesure qu’il progresse dans son œuvre, Nabokov devient de plus en plus exigeant envers lui même et envers son lecteur. Il n’a jamais douté de sa capacité à s’inscrire dans l’histoire littéraire, élargissant simplement le champ géographique de celle-ci pour passer de la littérature russe expatriée à la littérature russe tout court (Le Don s’inscrivant dans cette étape) avant d’atteindre la littérature américaine puis mondiale. Le lecteur a de plus en plus besoin d’accompagnement pour répondre aux ambitions de l’auteur, ce qui explique l’inflation progressive de l’appareil critique. La lecture est exigeante, stimulante, gratifiante, même si l’on se demande parfois si on est à la hauteur. Restons donc, pour cette notule, à ras de terre, et intéressons-nous au futile. Au début du roman apparaît “une tabatière Soyote en verre dépoli”. Une note indique que “les Soyotes sont un peuple de souche turque qui vit essentiellement dans le Touva, une région du Nord de l’Asie centrale”. Et voilà de quoi nourrir notre intérêt pour le suffixe “ote” lorsqu’il sert à désigner les habitants d‘un lieu. Au fil de différentes notules, j’avais noté la progression d’une liste de ses apparitions : Chypriotes, Smyrnotes, Cairotes, Stambouliotes, Skopjotes, Sofiotes, Andriotes, Chiotes, Stromboliotes, Nilotes, Épirotes, Rouméliotes, Parganiotes, Dubaïotes, Avuillotes, Colognotes, Dardagnotes, Pregnotes et Satignotes en étaient les éléments. Depuis la dernière mise à jour qui date d’octobre 2012, Claude Jonas m’a indiqué les Tiniotes de Tinos et les Syriotes de Syros; dans E. Lucas Bridges (Aux confins de la terre) j’ai trouvé trace des Chilotes, habitants de l’île de Chiloé au large des côtes chiliennes – que j’aurais préférées chiliotes; j’ai ajouté, sans noter mes sources, les Capriotes, les Souliotes et les Phanariotes (membres des riches familles vivant dans le quartier du Phanar à Constantinople); Marc-Gabriel Malfant m’a confié avoir entendu parler de Golfiotes sur France Culture; Pierre Cohen-Hadria m’a signalé que les Corfiotes habitaient Corfou; j’ai trouvé chez Pierre Bergounioux mention des Maïnotes (originaires de Maïna ou Magne, dans le Péloponnèse) et j’ajoute donc aujourd’hui ces nabokoviens Soyotes. Je sais qu’il serait simple d’obtenir une liste plus complète et mieux rangée en quelques clics m’envoyant sur un site quelconque mais cela ne m’intéresse pas : je n’ai pas l’âme d’un internote et je préfère la glane au fil des lectures et des conversations.
                  Le cabinet de curiosités du notulographe. Manifestations (spontanées) de soutien au notulographe à Nancy (Meurthe-et-Moselle).
     
photo de Maloë Dussaucy, 23 janvier 2016 / photo de Muriel Decq, 27 janvier 2016
SAMEDI.
              Films vus. Vénus aveugle (Abel Gance, France, 1941)
                               En mai, fais ce qu’il te plaît (Christian Carion, France – Belgique, 2015)
                               The Hi-Lo Country (Stephen Frears, R.-U. – Allemagne – E.-U., 1998)
                               Premiers crus (Jérôme Le Gris, France, 2015)
                               Le premier homme (Gianni Amelio, France – Italie – Algérie, 2011)
                               Case départ (Lionel Steketee, Fabrice Éboué, Thomas N’Gijol, France, 2011).
              L’Invent’Hair perd ses poils.  
   
Fabrezan (Aude), photo d’Hervé Bertin, 27 août 2010 / Metz (Moselle), photo de François Golfier, 25 novembre 2012
              Poil et plume. “Trois fois par an, George le conduisait en voiture à Herndon pour qu’il se fasse couper les cheveux; il s’asseyait à l’avant de la vieille Reo, raide comme un Indien, dans son costume de ville tout aussi raide, son nez impérieux en bec de faucon sous le feutre mou couleur d’ardoise, la mâchoire en avant. Et il s’asseyait de la même manière chez Whitey Judd, sur le fauteuil de coiffeur, ses longues mains fines, tannées par le grand air, immobiles sur les accoudoirs froids, tandis que plusieurs mois de cheveux tombaient en tas sur le carrelage blanc autour de lui.” (Thomas Savage, Le Pouvoir du chien)
Bonne année,
Philippe DIDION